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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 34.djvu/567

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Le souvenir des crimes qu’ils ont froidement prémédités n’a point troublé le repos de leur conscience ; nul repentir ne les a effleurés ; ils sont restés ce qu’ils furent au moment de l’action, implacables. Lefrançais, ancien maître d’école révoqué, qui siégea à la commune pour le IVe arrondissement et vota contre l’établissement du comité de salut public, a publié à Neufchâtel, en 1871, un volume intitulé : Étude sur le mouvement communaliste à Paris ; c’est une glorification de la commune, il est superflu de le dire, mais on aurait pu croire que cet homme, relativement modéré, désapprouverait certains faits de basse férocité et honteux. Il n’en est rien. Pour lui, « Chaudey n’était point un otage, mais un accusé. » Il reconnaît que l’arrestation fut « un acte d’insigne maladresse, » mais « quant à sa mort, toute cruelle qu’elle fût, la responsabilité en remonte, comme pour la mort des otages, à ceux qui dès le début de la lutte, ainsi que le témoigne la proclamation Gallifet du 2 avril, ont érigé en système l’assassinat des prisonniers (p. 268). » Après la commune, ils se sont glorifiés de ce meurtre ; pendant la commune, ils ont fait comprendre qu’ils le trouveraient légitime. Courbet avait honnêtement protesté contre l’incarcération de son compatriote Chaudey. Pilotell, qui en qualité de commissaire de police avait arrêté celui que Raoul Rigault devait tuer, répondit : « 24 avril 1874. Mon cher Courbet, vous trouvez l’arrestation du nommé Chaudey scandaleuse ! Si vous aviez été, comme moi, le fusil à la main, sur la place de l’Hôtel-de-Ville, le 22 janvier, vous ne me blâmeriez pas d’avoir arrêté cet assassin. » Les contumax sont restés fidèles à ce principe qu’il faut intervertir résolument les rôles et démontrer à l’histoire que les assassins sont des victimes et que les victimes sont des assassins. En cela consiste ce qu’ils nomment un appel solennel à la justice et au droit.


III. — LES PROGRAMMES.

Ceux qui étaient ou qui se croyaient en état de manier une plume ont écrit leur histoire ; ils ont écrit le mémorial de la commune et les fastes de l’Hôtel de Ville ; ils se sont déifiés et ont vilipendé la France. Ils sont conséquens à eux-mêmes, ne se démentent pas, mettent dans leur récit autant de sincérité que dans leur gouvernement, font de la polémique comme ils faisaient la guerre ; leur encrier aussi est plein d’huile de pétrole. Un des meilleurs d’entre eux, Arthur Arnould, ne peut échapper à ce genre de plaidoyer qui travestit les faits, les. dénature et reporte sur des adversaires les