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du budget de l’état ; quoiqu’elles aient ordinairement une fortune propre et que les rétributions scolaires restent à leur disposition, il n’en est pas moins vrai que c’est surtout par les subventions de l’état qu’elles se soutiennent. Or l’état n’est pas ménager de son argent ; il sait que ses universités lui procurent le triple avantage de travailler pour la science, de contribuer à sa propre gloire et de servir sa politique. Il dépense beaucoup pour elles ; mais par cela même qu’il fait les frais de ces grands corps et qu’il fixe les traitemens de leurs membres, il exerce sur eux une autorité toute naturelle. Ces universités relèvent, aussi bien qu’en France, d’un ministère de l’instruction publique. Prenons garde que les apparences ne nous fassent illusion. De ce que nous voyons dans chaque université allemande un sénat composé de professeurs, un recteur, rector magnificus, élu par eux, des doyens également élus, n’allons pas nous hâter de conclure que cette université soit une petite république absolument libre. A côté de ce recteur et de ce sénat, il y a le curateur, lequel est nommé par le gouvernement ; il est un véritable fonctionnaire public, et il a pour mission de surveiller l’université. Il avertit le ministre des irrégularités qui se produisent, et, au besoin, il transmet au corps enseignant les remontrances du ministre. S’agit-il par exemple pour un professeur d’obtenir un congé, ce n’est pas au rector magnificus, c’est au curateur qu’il devra s’adresser. Le curateur est en Allemagne à peu près ce que le recteur est en France, à cela près qu’il exerce une action encore plus directe et plus constante. En lui réside l’autorité ; il représente l’état. On ne voit pas d’ailleurs que les Allemands se plaignent d’un pouvoir qui les protège en même temps qu’il les surveille ; on n’aperçoit ni esprit tracassier chez le fonctionnaire, ni susceptibilité ombrageuse chez le professeur ; chacun reste dans son rôle avec mesure et bon sens.

Les professeurs allemands ne sont pas plus qu’en France nommés par leurs collègues ; ils le sont à peu près autant qu’en France. Lorsqu’une chaire devient vacante en Allemagne, l’usage le plus fréquent est que la faculté présente trois candidats et que le ministre nomme l’un des trois. Il choisit qui il veut sur la liste ; il peut même choisir en dehors de la liste. Ce dernier cas s’est présenté et même plus d’une fois. Le principe est que la faculté donne au ministre un simple avis afin de l’éclairer, mais qu’elle ne lui impose en aucune façon sa volonté ; la nomination du professeur est toujours un acte de l’autorité publique. Nous ne voyons pas non plus que les Allemands se plaignent de cette règle ; ils pensent peut-être qu’un usage contraire offrirait de graves dangers. Les choix qu’un corps ferait directement ne seraient peut-être pas toujours