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nué en fait d’un chiffre très notable le subside qu’il avait voté. Pour prendre ces frais à sa charge, le gouvernement réclamait une allocation spéciale destinée tant à y faire face qu’à le couvrir de la perte qui résulterait pour lui de l’abandon des mesures fiscales que le clergé réclamait avec le plus d’instance. Ce ne fut pas sans peine que l’assemblée sortit de cette nouvelle difficulté et que l’accord s’établit entre elle et le gouvernement. Une déclaration royale retira l’impôt du huitième denier, la réduction des gages des officiers et les autres mesures vexatoires dont s’étaient plaints les députés. La couronne se contenta d’une allocation modérée, en sus des 4 millions, et prit à sa charge les frais de perception. Un contrat fut signé par lequel le clergé s’engageait à verser en cinq termes la subvention accordée. Ayant ainsi achevé sa tâche, la compagnie envoya, selon l’usage, une députation pour faire la harangue d’adieu à la régente, qui était alors à Fontainebleau. Les concessions (le l’assemblée avaient enfin dissipé la défiance manifestée dans le principe par Anne d’Autriche et son ministre envers les mandataires du clergé. Somme toute, c’était au gouvernement que restait l’avantage. Sans doute, il n’avait pas les 10 millions auxquels il prétendait d’abord, et qu’il ne se flattait pas, selon toute apparence, d’obtenir, mais il encaissait 4 millions nets, et, dans l’état des affaires, une telle rentrée était pour le trésor royal une véritable bénédiction.


II.


On pouvait croire, après cet heureux résultat, que l’harmonie entre le clergé et la couronne était assurée pour longtemps. L’habileté que déploya Mazarin dans l’affaire du jansénisme, après l’émotion provoquée par l’apparition du livre d’Antoine Arnauld sur la fréquente communion, dut confirmer les amis de la paix dans ces espérances. Malheureusement l’ordre ecclésiastique ne pouvait tout à fait échapper aux excitations révolutionnaires de la fronde. Déjà en 1649 le clergé s’était mêlé aux agitations politiques ; il avait pris part à la lutte soutenue contre le gouvernement impopulaire de la régente. Ses principaux représentans s’étaient réunis à la noblesse pour forcer la main à Anne d’Autriche, et, d’accord avec le duc d’Orléans, les deux ordres avaient traité ensemble des affaires de l’état et s’étaient séparés en arrachant de la couronne la permission de s’assembler toutes les fois qu’on manquerait aux promesses données. Le clergé était résolu d’arrêter ainsi les atteintes portées aux privilèges et immunités des ecclésiastiques comme à ceux des gentilshommes. Quand, en mai 1650, l’assemblée du clergé ouvrit sa session, la situation était plus grave encore que l’année précédente.