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passer à peu près par où le voulait la couronne, l’assemblée repoussa le subside de 1,500,000 livres, qui lui était demandé ; elle ne vota qu’un million, et encore sous la condition que le recouvrement en serait fait par le receveur général du clergé et non autrement. Le roi trouva ce chiffre bien maigre et s’en expliqua devant les agens en termes assez vifs, disant qu’il ne voulait pas recevoir du clergé durant son règne moins que n’avaient reçu ses prédécesseurs. Il écrivit à l’assemblée pour réclamer un ou deux millions de plus. Le zèle que déploya l’archevêque de Narbonne pour soutenir cette nouvelle demande indisposa fort ses collègues, mais cela n’alla pas jusqu’à la faire repousser. On redoutait l’irritation du roi. Deux millions furent votés et en surplus 1,500 livres de gratification à M. Duplessis-Guénégaud, secrétaire d’état, pour reconnaître ses bons offices. La compagnie fit une libéralité mieux placée en attribuant 36,000 livres à la veuve de Charles P% qui était dans la gêne.

Le peu de résistance que les députés avaient fait pour accorder ce subside supplémentaire enhardit Louis XIV à exiger encore davantage ; il leur fit demander une nouvelle somme de deux millions, sous prétexte que le clergé était en mesure de donner une part contributive plus forte. Il y avait dans de telles requêtes de quoi indisposer sérieusement l’assemblée, bien que dans cette nouvelle demande le gouvernement eût mis plus de formes que dans les précédentes, qu’il eût déclaré que c’était là une pure libéralité qu’il sollicitait, non une injonction qu’il adressait. La compagnie délibéra derechef et elle se résigna à donner trois millions au lieu des deux qui avaient été précédemment accordés. Il fallait en finir. On était arrivé au mois de mars 1657. Il y avait près de deux ans que les députés siégeaient. Jamais session ne s’était tant prolongée. Elle ne fut toutefois close que le 5 mai.

Malgré les défaillances qui se produisirent à la fin de sa longue existence, cette assemblée doit être signalée comme une de celles où fut défendue avec le plus de vigueur et de ténacité l’autonomie temporelle de l’église gallicane. Elle compta dans ses rangs plusieurs membres éminens du clergé. Sans parler de Claude de Rebé, archevêque de Narbonne, et de Pierre de Marca que j’ai déjà mentionnés, je rappellerai les noms de Daniel de Cosnac, évêque de Valence et de Die, plus tard archevêque d’Aix, de l’abbé de Rancé, alors archidiacre de Tours et commendataire de l’abbaye de la Trappe, de l’habile théologien François Hallier, professeur en Sorbonne et dans la suite évêque de Cavaillon, de Henri de Béthune, archevêque de Bordeaux, de La Roche-Elavin , conseiller clerc au parlement de Toulouse, d’Antoine Godeau, évêque de Vencc, l’un des premiers membres de l’Académie française, de Simiane de Cordes, alors chanoine comte de Lyon, depuis évêque de