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par un seul exemple combien de problèmes se présentent à chaque pas dans Rome pour l’observateur attentif, et particulièrement pour l’historien de la renaissance.

Il y a, sur la porte de bronze de Saint-Pierre, sans compter la riche bordure entourant chacun des deux vantaux, quatre grands cadres, deux petits, et quatre bandes dans les intervalles. En haut, le Sauveur d’un côté et la Vierge de l’autre, assis sur des trônes. Au-dessous, saint Paul tenant le glaive et ayant à ses pieds le vase mystique, le « vase d’élection, » d’où sort la fleur où se pose la colombe; en regard, saint Pierre debout, qui remet les clés au pape agenouillé. — Un premier trait peu remarqué, et que Pistolesi par exemple, dans son grand ouvrage en huit volumes in-folio sur Saint-Pierre et le Vatican, passe entièrement sous silence, bien qu’il ait son intérêt spécial, c’est que chacun des deux derniers sujets est entouré en partie par une bande portant des caractères orientaux. Il y en a de pareils aux nimbes des deux apôtres. Comment concevoir ici des inscriptions arabes, et comment faut-il les interpréter? — La réponse est facile : ces caractères n’offrent aucun sens par eux-mêmes; on a simplement ici un exemple de ce motif de décoration que l’art de l’Occident aimait alors à emprunter aux œuvres orientales ou siciliennes : on se rappelle, dans les peintures de la même époque, les vêtemens de madones aux franges pareillement ornées de caractères arabes, sans nulle signification littérale.

La partie inférieure a d’abord deux grandes scènes avec beaucoup de personnages. D’un côté, le jugement de saint Paul, citoyen romain, son supplice en cette qualité par le glaive, et son apparition à Plautilla : il lui rend le voile que, suivant la légende, il a reçu d’elle pour se couvrir les yeux au dernier moment. Sur la lisière d’un bois, un lion dévore un chevreuil, symbole assez fréquent du martyre. En face du supplice de saint Paul l’artiste a placé le supplice de saint Pierre. Une troupe armée emmène l’apôtre, les mains liées, en présence de l’empereur, au bruit des trompettes, et on l’attache sur la croix, la tête en bas. Le plus intéressant ici est la manière dont l’auteur a voulu faire entendre quel fut le lieu de la scène. Il l’a désigné par plusieurs monumens. Le premier, à droite du spectateur, est une petite pyramide, très ornée, et qui porte encore des traces d’or et de pâtes de couleur. Un peu à gauche, on voit un grand arbre, puis un édifice circulaire sur une large base carrée, avec des colonnes et plusieurs étages; et enfin une pyramide plus haute que la première, et à laquelle est adossée une déesse de Rome, tenant de la main gauche une statuette de Pallas. — Nous reconnaissons facilement que l’artiste a voulu représenter par l’édifice