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Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 39.djvu/351

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thème céleste de nativité? Qu’est-ce que la métallité et la quintessence de la métallité? Comment les démons pénètrent-ils dans les hommes? Quelles sont les diverses voies par où ils en sortent? » Assez. Je comprends: nous sommes en plein moyen âge, vers le XIIe siècle, au beau royaume de la quintessence et de l’entéléchie, où, comme dit Rabelais, on s’exerce à faire la chasse au vent avec des filets, à labourer et ensemencer le sable, à tirer le lait dans des cribles, et où des sentinelles sont occupées sur des tours à garder la lune contre les loups; votre programme est emprunté au Livre des sentences de Pierre le Lombard, qui fut le grand manuel de cette époque. Il est vrai que ce programme se retrouverait presque tout entier en plein XIXe siècle, dans les cours des séminaires, — embelli de beaucoup d’autres questions qu’on ne peut même pas traduire en français. D’où il faut conclure qu’il n’est pas impossible à quelques-uns de vivre à la fois dans le XIIe siècle et dans le XIXe. — Voici maintenant des fragmens d’un autre programme : « Production de l’électricité par le frottement; électroscope, électrophore... Spectre solaire... Analyse spectrale... Préparation de l’acide azotique... acide sulfureux, acide sulfurique... Notions sur les terrains de sédimens anciens ou primaires, sur les terrains secondaires, tertiaires et quaternaires. » — Cette fois il n’y a plus d’hésitation possible : nous sommes, ou approchant, en l’an de grâce 1880. Nos programmes actuels de philosophie sont sans doute, comme les autres, en progrès, — moins cependant que les autres, et nous y verrons tout à l’heure subsister plus d’un souvenir de la scolastique : on n’y parle plus de la « quintessence », on y parle encore de la « substance. » En ce moment, cherchons les questions nouvelles à introduire dans ce qu’on nomme les classes d’humanités et même dans celles de grammaire.

La première réforme que nous proposons est bien simple. Il existe déjà un programme de morale, assez étendu, que les professeurs de philosophie ont charge de développer devant les élèves de l’enseignement spécial. Nous demandons que les élèves de l’enseignement classique ne soient pas jugés incapables de recevoir le même enseignement que leurs camarades du même âge. Si on les jugeait impropres à comprendre ce que ceux-ci comprennent, ce ne serait pas l’éloge du latin et du grec, que l’on nous représente pourtant comme le Sésame, ouvre-toi des intelligences.

Le programme dont nous parlons pourrait être adopté, avec les modifications nécessaires, dans la classe de quatrième pour les élémens de la morale privée, et dans la classe de seconde, pour les élémens de la morale publique. Il serait enseigné par le second professeur de philosophie et demanderait une leçon par semaine. Il n’est pas seulement utile, il est nécessaire de faire comprendre