Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 40.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

républicain I république ou monarchie. Et l’équivoque fut telle que des conservateurs constitutionnels furent battus par des radicaux qui ne cachaient point leur peu de goût pour une constitution aussi contraire à leurs principes et à leurs aspirations. Et pourtant le pays ne voulait, dans ces élections, pas autre chose que la république avec la constitution. Il y avait, il est vrai, une clause de révision, clause que, par parenthèse, le parti conservateur ne serait guère tenté aujourd’hui d’invoquer, et qui laisse la porte ouverte plutôt à une convention qu’à une monarchie. Il n’y avait pas là de quoi inquiéter le parti républicain ni le pays sur l’avenir du gouvernement nouveau. Le pays n’en nomma pas moins des républicains, comme tels, sans se demander si ces républicains étaient conservateurs ou même constitutionnels. La lutte avait été vive. Comme toujours et partout, on avait prodigué dans tous les partis les épithètes les plus malsonnantes du vocabulaire politique. Mais il n’y eut rien, dans cette lutte légale, qui pût donner au parti vainqueur le droit de représailles. Et déjà pourtant la majorité républicaine inaugura une politique de passion et de combat que la sagesse des ministères Dufaure et Jules Simon ne put arrêter. On comprend mieux l’irritation d’une majorité renvoyée brusquement devant ses électeurs, avant que le conflit entre les deux chambres fût assez éclatant pour que la constitution fît au président de la république une nécessité de la dissolution. Toute arme parut bonne de part et d’autre dans une lutte à outrance où les uns croyaient combattre pour le salut de la république, et les autres pour le salut de la société. Mais enfin, pas plus sous ce ministère que sous l’autre, il ne s’agissait du salut de la république. Quoi qu’on fit ou dire, le 16 mai fut une campagne entreprise, sous le drapeau de la constitution, contre une politique dont on croyait entrevoir le prochain avènement. La crise terminée par la victoire du parti républicain, par la résignation du maréchal, et par l’avènement d’un nouveau ministère Dufaure, on pouvait croire que la paix allait sortir d’une lutte où l’opposition avait montré sa force et le gouvernement son impopularité. Il est si facile aux vainqueurs d’être sages et généreux ! Qu’y avait-il à faire ? Révoquer les fonctionnaires véritablement compromis, invalider les élections entachées de fraude, de violence, de corruption, faire justice par les tribunaux des actes qui sont des délits électoraux, rappeler leur devoir à tous les fonctionnaires conservés, ramener les partis au respect des institutions consacrées par la volonté nationale. On fit bien autre chose, et ce que nous voyons en ce moment ne semble malheureusement pas la fin de la politique dans laquelle on s’est engagé.

Pourquoi avons-nous tenu à rappeler cette histoire bien connue