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Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 41.djvu/621

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de catholiques dont O’Connell faisait partie et après avoir annoncé qu’à son arrivée à Londres il soulèverait de nouveau la question catholique dans le parlement. Les fatigues du voyage aggravèrent son état. Les médecins de Londres, comme ceux de Dublin, lui défendirent de paraître à la chambre des communes. Lui-même sentait ses forces s’affaiblir rapidement, et il comprit qu’il n’avait plus qu’à se préparer à la mort. Il passa ses derniers jours au milieu de sa famille et de ses amis politiques, donnant à ces derniers les instructions qu’il croyait les plus propres à assurer le triomphe de la liberté religieuse, parlant de sa mort prochaine avec une rare fermeté et réglant la question de ses funérailles, avec autant de liberté d’esprit que s’il se fût agi d’un autre que de lui-même. Il avait d’abord demandé d’être enterré à Moyanna, en Irlande, où il possédait une propriété achetée et offerte en 1782, moyennant la somme de 50,000 livres sterling, par le parlement irlandais. Sur ces entrefaites, le duc de Sussex, l’un des frères du roi, dont les opinions étaient celle du parti libéral, lui fit dire que ses amis politiques avaient l’intention de demander que ses funérailles fussent faites à Westminster. Il accepta cette offre, puis il recommença à parler de l’émancipation des catholiques, remit à ses amis un écrit contenant ses dernières instructions politiques, en recommandant de le faire lire dans la chambre des communes par Plunkett. Tout étant ainsi réglé, il s’éteignit le 4 juin à six heures après une courte agonie. Il fut enterré à Westminster, près de Fox, dont il avait partagé les opinions. Le duc de Sussex, le duc de Wellington, le marquis de Wellesley, le duc de Norfolk, le chef de la plus grande maison catholique d’Angleterre, assistèrent à ses funérailles. Les catholiques d’Irlande y envoyèrent une députation.


III

En choisissant Plunkett pour lire son testament politique dans la chambre des communes, Grattan l’avait en quelque sorte désigné comme son successeur. William Plunkett, né à Enniscorthy, en 1765, était fils d’un ministre protestant de la secte unitaire. Inscrit au barreau de Dublin, il y avait conquis sans contestation possible la première place. En politique, il appartenait au petit groupe des amis de lord Grenville, qui l’avait nommé attorney-général d’Irlande lorsqu’il forma le ministère de tous les talens. A la chute de Grenville et à l’avènement du duc de Portland, il abandonna ses fonctions, mais dans l’intervalle il était entré à la chambre des communes, où il siégea sans interruption pendant vingt ans, jusqu’à son élévation à la pairie sous le ministère de