excitations, et de finir par l’affaiblissement de tous les combattans, par une sorte de neutralisation de toutes les forces dans des situations indécises.
La coalition de 1839, par elle-même, n’avait assurément rien d’illégitime ; elle procédait d’une pensée des plus sérieuses, la pensée de redresser la politique du pays, de maintenir l’intégrité des droits parlementaires, l’honneur des partis, et si elle avait pu réussir jusqu’au bout, peut-être tout aurait-il été changé dans les destinées de la monarchie de juillet. Malheureusement dans cette crise, il n’y avait de succès réel pour personne, pas plus pour l’opposition que pour le ministère. Le comte Molé, par la fierté de son attitude, avait, il est vrai, un peu relevé le courage de cette masse qui dans les chambres suit tous les gouvernemens ; il avait gardé strictement une majorité. Une majorité de quelques voix ne suffisait pas pour le faire vivre, il le sentait. Vainement, pour essayer de se raffermir, tentait-il la grande partie, la dissolution de la chambre, l’appel au pays par les élections : la dissolution ne servait qu’à passionner l’opinion, et le scrutin public ne faisait que précipiter la défaite de la politique du 15 avril. La coalition, de son côté, avait réussi à ébranler le ministère, elle l’avait surtout vaincu dans les élections ; elle n’avait pas un avantage assez décisif pour s’imposer, et de plus, si elle était restée unie dans le combat, elle subissait l’inévitable loi, elle se divisait dans la victoire. Qu’arrivait-il dès lors ? La conséquence des élections avait été la chute de M. Molé suivie d’un appel adressé à ses adversaires, et c’est là justement qu’on entrait dans une phase nouvelle, la phase obscure, laborieuse de la crise.
Tantôt on essayait une large combinaison qui aurait réuni M. Thiers, M. Guizot et leurs amis sous l’autorité du maréchal Soult en se complétant par l’élévation de M. Odilon Barrot à la présidence de la chambre. C’était ce qu’on appelait la combinaison de « grande coalition : » elle échouait presque aussitôt devant les répugnances de la gauche, que M. Guizot, malgré une récente alliance, voyait se réveiller contre lui. Tantôt on se repliait vers un ministère de pur centre gauche, qui, à son tour, semblait impossible avec un parlement partagé, en face des conservateurs demeurés puissans dans la chambre et encore irrités des dernières luttes. M. Thiers, qui avait été un des premiers appelés, qui était de toutes les combinaisons, ne se déguisait pas à lui-même les difficultés ; il les voyait, il les précisait avec une vive et ingénieuse pénétration. Il se montrait prêt à entrer au pouvoir, non cependant sans faire ses conditions, qui n’étaient pas toujours acceptées. Le roi, qui savait au besoin s’incliner devant une nécessité évidente, mais qui avait aussi assez de sagacité pour saisir l’avantage que lui