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d’un subterfuge. Il se fit passer pour un bâtiment américain en dérive par hasard.

Le 20 novembre, l’Allier arrivait avec trois cent soixante Autrichiens, vingt Mexicains, soixante chevaux ou mulets. Ces renforts étaient mis à terre à Bagdad, le même jour. Le lendemain, le général Mejia envoyait pour les prendre l’Antonia et deux autres petits bateaux à vapeur de même échantillon, l’Alamo et le Camargo, que la division armait, comme l’Antonia, d’une pièce de 12, d’une de 4 rayée et de quelques carabiniers ; ces trois bateaux partaient de Bagdad le 22 au matin pour Matamoros, où ils arrivaient le 23 sans obstacle. Ce renfort décida les libéraux à la retraite. Pourtant, en s’en allant, Escobedo chercha à surprendre Monterey ; mais le commandant La Hayrie, venu de Saltillo, et le général Jeanningros, de Montclava, sauvèrent la ville et poursuivirent le général mexicain.

La délivrance de Matamoros amena le rétablissement de la tranquillité à Tuspan et à Tampico, où les partis s’étaient agités et que les bandes ordinaires du Tamaulipas et de Papantla avaient menacés pendant les événemens du Nord. A Tampico, le commandant supérieur, le capitaine Carrère, avait maintenu la défense sur un bon pied. Successeur du lieutenant Voilée, qui avait indisposé la population par certains actes agressifs, il s’était étudié à ramener l’ordre, et, comme chaque officier avait son meilleur plan de conquête et de soumission pour le Mexique, il avait cherché par quelque déférence et quelques égards pour le général La Madrid, qui commandait à Tuspan, en lui laissant, par exemple, passer la revue des troupes de la contre-guérilla et de la garnison, le jour de la Saint-Maximilien, à rehausser, par l’amour-propre flatté, chez les Mexicains, le sentiment de leur valeur et de leur dignité personnelle. Il n’avait rehaussé que leur amour-propre. La Diligente avait dû séjourner à Tuspan, dans la rivière même. Le capitaine Revault avait su influencer discrètement la population et réorganiser la défense possible de la garnison. Il ne lui avait fallu que quelques carabiniers dans les cerros bien approvisionnés de vivres, d’eau et de munitions. Le préfet néanmoins avait été assassiné, et le capitaine de la Diligente, qui eût peut-être mieux fait d’envoyer par une occasion sûre le meurtrier au fort de Saint-Jean-d’Ulloa, l’avait laissé en prison, d’où il était probable que l’influence occulte, mais persistante, de M. Llovente le père le ferait échapper. Il est vrai que la Diligente, qui maintenant pouvait quitter Tuspan, n’aurait qu’à y revenir pour y ramener cette sûreté et cette fidélité douteuses qui étaient l’état normal des différens points du Mexique occupés par nous.