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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 44.djvu/897

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principes et de ses intérêts. Tel est en effet le fond commun des projets de La Chatolais, de Guy ton de Morveau, de Rolland. Sans doute, on n’y trouverait pas la pure conception de l’état enseignant, encore moins l’idée du monopole et de la centralisation universitaires. Il faudra du temps et singulièrement de génie pour tirer de leurs prédisses cette large et puissante conclusion. Mais le germe est né, il vit ; vienne qui le féconde, et il se développera.

C’est surtout le plan de Rolland qu’il faut étudier si l’on veut bien se rendre compte du mouvement des esprits en matière d’instruction publique dans les derniers temps de la monarchie. Le Mémoire de La Chalotais n’avait guère été qu’une furieuse et brillante charge contre les collèges ; les vues de réorganisation n’y abondent pas. De même, chez Guyton de Morveau, la partie critique est de beaucoup la plus importante. Avec Rolland, au contraire, nous sommes en présence d’un esprit très net et très positif, allant droit à la solution pratique, et l’indiquant toujours. Il y a d’incontestables qualités de style chez La Chalotais : du mouvement, de la chaleur, une grande vivacité ; il y avait surtout un administrateur chez Rolland, et, naturellement, un centralisateur. Il eût voulu que Paris devînt le chef-lieu de l’instruction publique et l’université de Paris la supérieure hiérarchique des universités provinciales. Au-dessus un conseil assez mal nommé bureau de correspondance, et un directeur supérieur de l’éducation, placé sous les ordres immédiats du ministre de la justice auraient été chargés de maintenir l’unité de renseignement. Ajoutez des visiteurs délégués par la faculté les arts pour l’inspection des collèges, la création d’une maison d’institution pour les maîtres, sorte d’école normale, enfin la subordination des établissemens privés aux collèges et à l’autorité de l’étal et vous aurez les grandes lignes d’un système qui ne manquait assurément pas de largeur.

Si large qu’il fut, pourtant, ce projet ne laissait pas d’être encore bien incomplet. En fait d’instruction primaire, Rolland se bornait à de platoniques déclarations et ne précisait rien ; en fait d’enseignement supérieur, ses vues étaient également bien confuses. Manifestement ce qu’il avait le mieux observé, le seul ordre d’études qui l’intéressât vraiment, c’étaient les humanités. Le XVIIIe siècle, il est vrai, n’allait guère au-delà et le plan de Rolland peut être considéré comme le testament du XVIIIe siècle en matière d’instruction publique, comme l’expression la plus achevée des aspirations de l’ancien régime à la veille de 1789. La révolution peut venir à présent ; elle trouvera le terrain tout préparé. Son rôle est bien nettement marqué : achever la réforme commencée par les parlemens, élaborer un nouveau plan d’études comprenant les trois