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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 45.djvu/345

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cheminée surmontée d’un manteau de forme pyramidale. C’est sur ce pan de mur qu’Allegri a peint sa Diane. « La belle chasseresse, le croissant au front, est légèrement assise sur le bord d’un char antique et se présente à peu près de face. Sa longue robe voile, sans les cacher, les formes superbes de son corps juvénile, et laisse à découvert sa gorge blanche. Son attitude exprime la rapidité de la course et l’élan à un mouvement fougueux. La joie de la course, la fraîcheur du grand air donnent à cette Diane une allégresse qui brille dans ses yeux et s’épanouit sur sa bouche. Elle est heureuse de fendre l’air, son sein bondit de plaisir, son voile et ses cheveux flottent autour d’elle. On dirait que l’air vif et matinal caresse volontiers ses bras nus et enveloppe voluptueusement sa taille de déesse et de fée. Une sève de vie virginale colore ses joues délicates, ses lèvres humides, et donne à ses grands yeux dilatés un regard plein de charme et de bonheur. Ce n’est pas la Diane sévère, aux formes presque viriles, au profil cruel de la statuaire grecque, c’est une Diane plus intime qui n’est que joie, douceur, abandon. »

La voûte de la chambre de Saint-Paul est peinte en treillage et divisée en seize compartimens par des listeaux de stuc. Cette treille recouverte d’un feuillage touffu, enrichie de fleurs et de fruits, est percée de seize ovales en forme de médaillons, où se détachent deux à deux des groupes d’enfans nus en train de jouer. C’est le cortège de Diane, ou plutôt c’est la suite naturelle d’une vierge heureuse et libre qui entraîne ces enfans dans les bois par sa beauté, son charme et son sourire. Il est évident que le peintre, en se conformant à l’architecture du lieu, s’est demandé ce qu’il pouvait faire pour le rendre aussi gai que possible. Il y a pleinement réussi. On s’y croit sous un berceau de vigne sauvage. Tous ces enfans qui se détachent sur le ciel bleu, dans les ouvertures, ont l’air de faire irruption dans la chambre avec leurs petits cris, leurs ravissemens et leur joie. La plupart portent les emblèmes de la chasse. Les uns se poursuivent à la course ou se disputent des fruits, d’autres jouent avec des lances, des arcs et des lévriers, d’autres se divertissent avec des couronnes, des mascarons et des têtes de cerf. Ils miment innocemment et sans le savoir la grande comédie de la vie. La variété, le naturel des poses, l’enjouement des physionomies est extraordinaire. On trouvera dans le livre de Mme Mignaty la description détaillée de ces groupes et l’explication des curieuses grisailles mythologiques d’un symbolisme mystérieux qui sont peintes en dessous.

Contentons-nous de rappeler l’impression que produisirent ces enfans sur un peintre de talent, cent ans après. Les Carrache voyageant à travers toute l’Italie, à la recherche du beau, se fixèrent pendant quelque temps à Parme, afin d’étudier et de copier le