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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 juillet.

On aurait beau s’en défendre et chercher à se faire illusion, on sent bien qu’à travers tout, sous une apparence de régularité routinière et de paix ininterrompue, il y a dans les affaires de la France des embarras et des malaises. On s’en aperçoit à des signes de toute sorte, non-seulement à cette fatigue inhérente sans doute à la saison et au déclin d’une session, d’une législature, mais encore à l’incohérence et à la confusion qui sont un peu partout, à l’incertitude des résolutions, à la manière décousue dont marchent les choses.

Ce n’est pas que la situation soit aggravée ou compromise. Il n’y a point en perspective, il est permis de le croire, de ces complications qui sont de nature à créer de sérieuses inquiétudes, et les incidens qui se sont produits depuis quelques mois, qui préoccupent justement l’opinion, qui attirent en ce moment l’attention publique sur les rives africaines, ces incidens ne sont pas de ceux qui peuvent déconcerter une grande nation. Le pays par lui-même n’est sûrement pas en disposition de susciter des difficultés ; il offre le plus rare spectacle de tranquillité, de bonne volonté et de soumission. Le mal n’existe pas moins, il se fait sentir à tout propos, dans la plupart des affaires, et pour qu’il en soit ainsi, il faut bien qu’il y ait une cause plus générale, plus profonde. La cause, c’est que depuis assez longtemps en vérité, depuis trois ou quatre ans ! au moins, on semble se complaire à gaspiller une situation prospère. Par inflation on dans un intérêt de domination, on mésuse un peu trop de tout. On vit d’expédiens, d’illusions, sans s’apercevoir que, pendant ce temps, avec ce système, les idées s’obscurcissent, les ressorts de l’état s’usent, le sens des grandes conditions de la vie publique s’altère.

Rien certes ne montre mieux le danger de cette politique d’optimisme, d’illusion et de confusion que ces affaires d’Afrique, qui ont été l’autre jour dans notre parlement l’objet d’une discussion plus animée, plus pénible que décisive, qui restent pour le moment une des plus