par la lecture des philosophes, des poètes, des historiens de l’antiquité : l’amour de la liberté, le patriotisme, tous les sentimens généreux acquièrent, avec une intensité plus grande, une plus haute portée. Quoi de plus touchant que ce trait si heureusement mis en lumière par M. Burckhardt ? Un jour que le célèbre humaniste florentin. Niccolo Niccoli passait devant le palais du podestat, il aperçut un jeune homme d’une figure si avenante qu’il lui prit fantaisie de causer un instant avec lui. Lui ayant demandé de qui il était fils, le jeune homme répondit : « De messer Andréa de’ Pazzi. » A une nouvelle question sur ses occupations, le jeune homme fit cette réponse : « Je m’occupe de m’amuser : Attendu a darmi buon tempo. » Le vieux philologue éclata en reproches : « Avec une figure comme la tienne, tu devrais avoir honte de ne pas connaître l’antiquité latine, ce serait pour toi le plus bel ornement. Sans elle tu n’arriveras à rien ; tout ton mérite disparaîtra avec la fleur de ta jeunesse. » Ces paroles frappèrent le jeune homme, qui reconnut la justesse des observations de Niccoli ; il s’excusa en disant qu’il ne demandait pas mieux que de s’instruire, pourvu qu’il trouvât un bon professeur. « Je me change de ce soin, » répondit son interlocuteur, et il lui amena en effet un savant très versé dans la connaissance du grec et du latin. Piero de’ Pazzi se mit alors à étudier jour et nuit ; il apprit par cœur dans ses courses de Florence à la villa de Trebbio, toute l’Enéide et un grand nombre de discours contenus dans Tite-Live, devint un ami des savans et un homme d’état remarquable.
A Rome, du temps même de Sixte IV et de Philelphe, un professeur de l’université, un savant considérable, représentait sans ostentation les traditions de noblesse et de vertu, legs de l’antiquité classique. Issu d’une des plus illustres familles du royaume de Naples, les Sanseverino, princes de Palerme, il n’avait pas hésité à renier ses parens, voulant tout devoir à la science, et à changer son nom patronymique contre celui de Pomponius Lætus, sous lequel il a passé à la postérité. Il entreprit, tout jeune, un voyage en Sicile pour y visiter les localités décrites par Virgile ; puis il parcourut l’Europe orientale, regardant à la fois les hommes et les choses, la nature et les monumens. Plus tard, fixé à Rome, il suivit les cours de Laurent Valla, qu’il eut l’honneur de remplacer. L’antiquité ne tarda pas à régner en souveraine dans son esprit ; il l’étudia à la fois en historien, en philologue et en épigraphiste. Il fondait en larmes à la lecture d’un passage éloquent ou à la vue d’une belle ruine. À cette admiration sans réserve pour le passé s’alliaient le mépris de l’argent, la haine de l’envie et de la médisance, l’indépendance des opinions. Pomponius Lætus n’était cependant pas