mais la conséquence de ces extensions, faites sous la forme d’acquisitions de famille et non de conquêtes, et d’après les règles du droit civil plus que d’après celles du droit des gens, c’était que presque toutes les provinces réunies sous le sceptre de la famille de Habsbourg lui étaient arrivées par contrats de mariages, grevées de substitutions de tout genre, de dispositions testamentaires les plus diverses qui épuisaient à peu près toutes les variétés et toutes les complications de la jurisprudence germanique en matière successorale. L’extinction de la ligne masculine donnait ouverture à des prétentions litigieuses de tout genre au profit des agnats ou des cognats de tous les degrés. Vainement Charles VI avait-il cherché à prendre les devans sur ces contestations en réglant lui-même sa succession par un édit auquel il avait donné le nom de pragmatique sanction, réservé aux actes législatifs les plus solennels de l’empire ; vainement avait-il demandé pour cet édit réglementaire la garantie des principales puissances d’Europe et l’avait-il obtenue au prix de coûteux sacrifices : il n’avait pas grande foi lui-même dans ses efforts, et l’événement prouva qu’il n’avait pas tort. Il voyait déjà, le lendemain de sa mort, tous les princes de sa parenté et de son voisinage arriver, munis d’un parchemin gothique, pour réclamer un lambeau de son empire. La main d’une femme serait-elle assez forte pour rassembler et retenir le faisceau déjà désuni de tant d’états divers, et la couronne impériale, qu’une élection déjà plus de dix fois renouvelée avait rendue comme héréditaire dans la maison d’Autriche, qu’allait-elle devenir quand cette maison n’offrirait plus de tête virile pour la porter ?
La jeune monarchie dont le siège était à Berlin, moins riche en souvenirs, moins puissante en apparence, n’avait pas à craindre de pareils déchiremens. Sa rapide extension, devenue telle surtout depuis la réforme, était due à de prudentes négociations et à de hardis faits d’armes et, bien que ces diverses acquisitions, répandues sur le continent germanique, n’eussent pas un caractère d’homogénéité, — bien que par leur étendue et leur dispersion elles présentassent même une ligne de défense assez difficile, — aucune cependant n’était contestée et n’ouvrait la porte à des revendications à craindre. Au centre d’ailleurs de ces possessions, l’ancien patrimoine de la maison de Brandebourg, grossi de la Pomeranie, de la Prusse et de la Basse-Lusace, formait un noyau compact où de robustes populations, dévouées à leur souverain, étaient gouvernées par une administration énergique. Puis, par une faveur que la Providence ne fait guère qu’aux dynasties nouvelles, trois souverains venaient de se succéder sur le trône, doués de qualités inégales, mais toutes propres à leur permettre d’assurer, chacun dans son genre et à son heure, soit ! a solidité, soit l’éclat de leur récente grandeur. Par