votre sérieux, votre droiture, votre honnêteté enseignaient dans la perfection.
Sans le vouloir, Saint-Sulpice, où l’on méprise la littérature, est ainsi une excellente école de style, car la règle fondamentale du style est d’avoir uniquement en vue la pensée que l’on veut inculquer, et par conséquent d’avoir une pensée. Cela valait bien mieux que la rhétorique de M. Dupanloup et le gongorisme de l’école néo-catholique. Saint-Sulpice ne se préoccupe que du fond des choses. La théologie y est tout, et, si la direction des études y manque un peu de force, c’est que l’ensemble du catholicisme, surtout du catholicisme français, porte très peu aux grands travaux. Après tout, Saint-Sulpice a eu, de notre temps, comme théologien, M. Carrière, dont l’œuvre immense est, sur quelques points, remarquablement approfondie ; comme érudits, M. Gosselin et M. Faillon, à qui l’on doit de si consciencieuses recherches ; comme philologues, M. Garnieret surtout M. Le Hir, les seuls maîtres éminens que l’école catholique en France ait produits dans le champ de la critique sacrée.
Mais ce n’est point par là que ces pieux éducateurs veulent être loués. Saint-Sulpice est avant tout une école de vertu. C’est principalement par la vertu que Saint-Sulpice est une chose archaïque, un fossile de deux cents ans. Beaucoup de mes jugemens étonnent les gens du monde, parce qu’ils n’ont pas vu ce que j’ai vu. J’ai vu à Saint-Sulpice l’absolu de la vertu et, associées à des idées étroites, je l’avoue, la perfection de la bonté, de la politesse, de la modestie, de l’abnégation personnelle. Ce qu’il y a de vertu dans Saint-Sulpice suffirait pour gouverner un monde, et cela m’a rendu difficile pour ce que j’ai trouvé ailleurs. Je n’ai trouvé dans le siècle qu’un seul homme qui méritât d’être comparé à ceux-là, c’est M. Damiron. Ceux qui ont connu M. Damiron ont connu un sulpicien. Les autres ne sauront jamais ce que ces vieilles écoles de silence, de sérieux et de respect renferment de trésors pour la conservation du bien dans l’humanité.
Telle était la maison où je passai quatre années au moment le plus décisif de ma vie. Je m’y trouvai comme dans mon élément. Tandis que la plupart de mes condisciples, affaiblis par l’humanisme un peu fade de M. Dupanloup, ne pouvaient mordre à la scolastique, je me pris tout d’abord d’un goût singulier pour cette écorce amère ; je m’y passionnai comme un ouistiti sur sa noix. Je revoyais mes premiers maîtres de Basse-Bretagne dans ces graves et bons prêtres, remplis de conviction et de la pensée du bien. Saint-Nicolas-du-Chardonnet et sa superficielle rhétorique n’étaient plus pour moi qu’une parenthèse de valeur douteuse. Je quittais les mots pour les choses. J’allais enfin étudier à fond, analyser dans ses