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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 48.djvu/84

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cherchant à se prémunir de tout côté ; elles révélaient aussi des violences calculées, des haines inassouvies, et d’ardentes convoitises impatientes de se satisfaire. On lira quelques-unes de ces dépêches. Elles serviront d’introduction au drame qui va se dérouler et qui, pendant tout un mois, tiendra en suspens la paix de l’Europe et l’existence de la France.


M. de Moustier à M. Benedetti, 31 mars.

« J’ai fait chiffrer de nouveau avec beaucoup de soin la dépêche d’hier au soir, que vous n’avez pas pu lire et je vous la réexpédie. »


M. Benedetti à M. de Moustier, 31 mars, cinq heures du soir.

« M. de Bismarck, ému par l’agitation que provoque en Allemagne l’affaire du Luxembourg et prévenu que le parti libéral se propose de l’interpeller dans la séance de demain, juge essentiel que l’on en retarde la conclusion. Je lui ai dit qu’au point où en sont les choses, il est plus facile au gouvernement du roi d’accepter la réunion du Luxembourg à la France qu’au gouvernement de l’empereur d’y renoncer. Il s’est plaint vivement de la communication que le roi des Pays-Bas avait adressée au roi Guillaume par le comte Perponcher ; elle ne lui permettait plus d’affirmer que la Prusse n’a pas eu l’occasion de s’opposer à la cession. Il a parlé aussi de manifestations regrettables dans le grand-duché. Je suis porté à croire que les véritables difficultés de M. de Bismarck proviennent de l’attitude du parti militaire, soutenu par les princes auprès du roi et de notre ferme résolution de ne consentir, en aucun cas, à la démolition de la forteresse. J’ai lieu de croire que la correspondance de M. de Goltz est conçue dans le sens le plus défavorable. »


M. Benedetti à M. de Moustier, 31 mars, 11 heures du soir.

« Depuis hier, M. de Bismarck se sent débordé par l’agitation qui a éclaté dans la presse et dans le parlement. Des interpellations sont annoncées pour demain. Le ministre répondra que, pressenti par le gouvernement hollandais, il a dit que, s’il était mis en demeure de s’expliquer, il aurait à consulter ses confédérés et les puissances signataires du traité.

« Le prince royal s’est annoncé chez lui. »


M. Benedetti à M. de Moustier, 31 mars.

« J’ai représenté à M. de Bismarck que tout était probablement