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C’est en Russie que paraît avoir commencé cette espèce de révolution qui a ouvert aux femmes l’accès des facultés et de l’enseignement supérieur. On avait créé pour elles une faculté de médecine spéciale. Dans une période de sept ans, 959 femmes s’étaient présentées aux examens de cette faculté ; 718 avaient été reçues. Le professeur de Cyon déclare que les femmes sont très propres aux recherches microscopiques et même anatomiques. Les professeurs ; ont constaté que les étudiantes en général se sont élevées à la même hauteur que les hommes. Le conseil des professeurs, consulté, a été d’avis d’attribuer aux élèves femmes les mêmes titres et les mêmes droits qu’aux hommes. M. de Cyon atteste que les femmes médecins rendant les plus grands services dans les campagnes ; plusieurs se sont engagées dans le service médical de l’armée lors de la guerre contre la Turquie. Cette faculté, qui fonctionnait si bien et donnait des résultats si satisfaisans, a été supprimée, mais des cours littéraires et scientifiques, qui formaient une sorte d’université à l’usage des femmes, ont été maintenus. Dans l’année 1881, le nombre des étudiantes dans cette petite université s’est élevé à 938. Les études sont de quatre ans, et il y a eu, cette année même, une première distribution de diplômes, au nombre de 163. Si de la Russie nous passons en Suisse, nous rencontrons des faits analogues. À Zurich, il existe une faculté de médecine suivie par les femmes. Trois dames, dans cette même ville, pratiquent la médecine avec une nombreuse clientèle. En 1881, il y a eu 11 élèves femmes suivant les cours de la faculté de médecine et 9 ceux de la faculté de philosophie (c’est-à-dire des lettres). À Berne, on en a compté 30 (dont 27 en médecine et 3 en philosophie). On cite une jeune fille qui a obtenu le titre de docteur en droit. À Genève, en 1881, l’université comptait 53 noms de jeunes filles, surtout pour les lettres. Nous voyons également en Angleterre les mêmes tendances se manifester[1]. Une charte de 1867 a conféré à l’université de Londres le droit de décerner aux femmes des degrés dans les sciences et dans les lettres. À l’University-College, des femmes sont admises à tous les cours. Il en est de même à Cambridge, mais avec l’autorisation des professeurs. Il y a des collèges à Girton et à Newnham-Hall, dirigés

  1. Nous ne donnons ici que les résultats consignés dans le rapport de M. L. Trasenster. Ceux qui voudront étudier la question plus à fond pourront consulter la Revue internationale de l’enseignement (15 janvier 1882), qui a publié un travail spécial et approfondi sur cette question : de l’Enseignement supérieur des femmes en Angleterre, en Écosse et en Irlande, par M. B. Buisson, examinateur à l’université de Londres. — Voir également sur la question en général le travail de M. de Laveleye (Revue de Belgique, nov. 1882) ; et enfin celui de M. Émile Beaussire : Quelques Mots sur les questions d’enseignement, dans la Revue du 1er août 1882.