Bientôt on n’en trouva plus du tout : personne ne voulut se charger, pour un prix certain et fixé à l’avance, des fermes qui furent alors exploitées en régie, et dont le produit tomba à 31 millions en 1709 pour remonter à 40 en 1710. D’un autre côté, la misère fut telle en 1709 que le roi fut obligé d’accorder sur le brevet de la taille de 1710 une diminution de 6 millions, et, en fixant le contingent de chaque généralité, une nouvelle diminution de 2 millions ; les droits d’entrée sur les bœufs et les moutons et sur les vins furent en même temps réduits. Ces pertes ne furent pas compensées par quelques fermes spéciales et quelques droits nouveaux, comprenant le contrôle des actes des notaires, la vente des poudres et du menu plomb, celle des cartes à jouer, etc. Ainsi amoindri, le produit brut des impôts eut en outre à supporter, chaque année, des prélèvemens et des charges plus considérables par suite du système suivi pour se procurer des ressources extraordinaires. Le produit net des revenus ordinaires, qui, dans les cinq premières années de 1689 à 1693, varia de 105 à 112 millions, ne fut plus après la paix de Ryswick que de 72 millions en 1698 et de 69 en 1700 : il tomba à 46 millions en 1708, au milieu de la guerre de la succession d’Espagne, à 36 en 1712 et 1713, et même à 32 en 1714. Le montant total des revenus nets de 1689 à 1714 ne dépassa pas 1,370 millions, tandis que le montant total des dépenses fut de près de 5 milliards. Deux impôts temporaires de guerre, la capitation, établie en 1695, supprimée en 1698 après la paix, rétablie en 1701, et le dixième, dont la perception ne commença qu’à la fin de 1710, donnèrent, il est vrai, 521 millions. Les dépenses n’excédèrent pas moins les recettes de 3 milliards 65 millions, et il fallut se procurer cette somme énorme par des expédiens et des procédés dont on a peine à comprendre aujourd’hui l’excès, l’aveuglement, l’imprudence. On emprunta en rentes perpétuelles et viagères 720 millions, et c’était la ressource la plus régulière ; on fit des affaires extraordinaires, des créations d’offices, des augmentations de gages, etc., pour 900 millions ; le bénéfice de cinq refontes successives des monnaies donna environ 140 millions ; on se procura 600 millions par l’émission de billets de circulation remboursables à terme fixe ; le surplus, dépassant 600 millions, fut assigné par anticipation sur les revenus des années suivantes, ou resta dû sans être ordonnancé ni payé.
Ce fut donc surtout au moyen des emprunts, des affaires extraordinaires, de la refonte des monnaies, de l’émission des effets royaux qu’on pourvut aux dépenses de la guerre. Il faut étudier et suivre chacun de ces expédiens de finances dans son système, dans son développement et dans ses résultats.