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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 62.djvu/840

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II.

Dans la soirée du 29 mai, Law, qui le matin avait envoyé sa démission au régent, se présenta au Palais-Royal : le prince refusa de le recevoir, et ce refus, qu’il affecta de ne pas dissimuler, fit penser qu’il avait l’intention de se séparer définitivement de l’ancien contrôleur-général. Cependant, le lendemain, après lui avoir accordé une audience particulière, il lui conféra le titre de conseiller d’état d’épée, avec celui d’intendant général du commerce, en lui laissant l’administration de la banque et de la compagnie des Indes, c’est-à-dire la direction effective des finances. La garde suisse, qui lui avait été donnée, reçut l’ordre de quitter sa maison. Law eut le mérite de ne pas perdre de temps et de chercher immédiatement les moyens d’atténuer la crise qu’avaient ouverte, pour la banque et pour la compagnie, les arrêts du 21 et du 27 mai ; mais, pendant six mois, il ne fit que se débattre inutilement contre une situation accablante, inexorable.

Le 1er juin, la liberté, pour tous, d’avoir plus de 500 livres en numéraire est rétablie, et les dispositions qui permettaient de rechercher l’or et l’argent dans les maisons sont abrogées (arrêt du 1er juin). Le 3 juin, la compagnie est autorisée, sur sa demande et sur la présentation de son bilan, à réduire à 200,000 le nombre de ses actions : — elle a, par ses achats, retiré des mains du public près de 300,000 actions et elle achètera ce qui sera nécessaire pour compléter ce nombre ; le roi consent à lui abandonner les 100,000 actions qu’il possède, « lesquelles étaient un bénéfice pour Sa Majesté ; » elle peut donc supprimer 400,000 actions. — Elle est autorisée à demander à ses actionnaires un supplément volontaire de 3,000 livres par chacune des 200,000 actions conservées : ceux qui le fourniront auront droit à un dividende de 360 livres, et ceux qui ne le fourniront pas ne jouiront que du dividende de 200 livres. — Des commissaires du conseil seront désignés par le roi pour dresser procès-verbal des souscriptions, primes et actions retirées par la compagnie et pour les faire brûler à l’Hôtel de Ville en présence du prévôt des marchands et des échevins (arrêt du 3 juin). La réduction du nombre des actions à 200,000 simplifie et soulage la situation de la compagnie ; mais elle la prive des versemens qu’elle avait encore à recevoir sur les actions non libérées