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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 63.djvu/390

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résolution qu’elle s’avancera contre un ennemi qu’elle connaît pour l’avoir vu reculer la veille. Quels obstacles rencontreront devant eux ces cent mille hommes ? Les troupes bavaroises de von der Thann qui se retirent en désordre sur Artenay ? Quand même elles opéreraient leur jonction avec les Mecklembourgeois avant d’être atteintes par notre armée, les forces réunies de von der Thann et du duc de Mecklembourg ne nous arrêteraient pas une demi-journée. L’armée ne s’expose à aucun péril. Sa gauche ne sera pas menacée, car les troupes allemandes qui occupaient la ligne de Chartres l’ont abandonnée pour couvrir le secteur sud de l’investissement de Paris. Sa droite est à l’abri de toute surprise, car les têtes de colonnes de l’armée de Frédéric-Charles ne paraîtront pas à la hauteur de Fontainebleau avant le 17 et ne pourraient en aucun cas rien entreprendre sur la route de Paris, avant le 23 ou le 24[1]. M. Gambetta veut marcher, M. de Freycinet l’y pousse vivement. Le ministre de la guerre quitte Tours avec l’intention bien arrêtée de lancer ses généraux à la poursuite de l’ennemi.

Il arrive à Orléans. Il voit le général d’Aurelles ; il le trouve hésitant. L’hésitation le gagne. Il perd son temps en conférences, en conciliabules, en conseils de guerre, comme tous les hommes indécis. Il était parti de Tours avec le dessein de marcher sur Paris ; il repart d’Orléans avec la résolution de se fortifier en avant de cette ville. Voilà l’homme. M. de Freycinet lui dicte un plan de conduite : il l’approuvé ; il s’en pénètre ; il en fait ressortir les avantages avec abondance, chaleur et conviction ; il le fera exécuter. Le général d’Aurelles fait des objections, les répète, y insiste : M. Gambetta en est touché, puis, frappé, il finit par se rendre. Il apportera à défendre auprès de M. de Freycinet le plan du général d’Aurelles la même abondance, la même chaleur, la même conviction qu’il a mises à soutenir auprès du général en chef la pensée

  1. « Il eût peut-être été possible, en mettant à profit l’enthousiasme de la victoire du 9, d’atteindre et d’achever de battre l’armée du général de Thann avant qu’elle eût pu être secourue par celle du grand-duc, sur laquelle on se serait porté ensuite, et de prendre ainsi les Allemands en détail avant l’arrivée du prince Charles. » (Chanzy, la Deuxième Armée, p. 95.) Rapprocher de ce passage du livre de Chanzy les passages du grand ouvrage de l’état-major prussien où il est parlé : 1o de la nécessité de la retraite des Bavarois sur Artenay (IIe partie, t. I, p. 406) ; 2o de la nécessité de la jonction des Mecklembourgeois et des Bavarois pour couvrir Paris (p. 410) ; 3o de la surprenante inaction des Français (p. 410).