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Au temps passé, la Nouvelle-Zélande possédait en palmiers une sorte de richesse; c’était une ressource alimentaire. Sous le climat très tempéré, même froid et humide, le paysage, en divers endroits, tournait la pensée au souvenir des régions tropicales. Les groupes de palmiers se détachant sur la végétation d’alentour formaient des contrastes à ravir les yeux d’un artiste. On en voyait non-seulement à l’île du Nord, mais également à l’île du Sud, au-delà du 44e degré de latitude; ils abondaient sur la péninsule de Banks. On n’en comptait, il est vrai, que d’une seule espèce[1]. Maintenant, les groupes sont épars; de rares échantillons de l’arbre qui, à certains jours de l’année, se pare de fleurs empourprées, sont les derniers témoins d’une ancienne splendeur. Les plantes de la famille des liliacées occupent une place importante dans la flore. C’est d’abord un type tout spécial et ainsi bien caractéristique, le phormium[2], la plante fameuse dont on tire la belle matière textile qualifiée de lin de la Nouvelle-Zélande, qui excita d’ardentes convoitises parmi les Européens. A la vue de la fibre brillante et soyeuse que les Maoris tiraient de la plante, fort commune sur les trois îles, les spéculateurs anglais qui, les premiers, se jetèrent sur la Nouvelle-Zélande, espéraient en obtenir d’incalculables richesses, il y eut d’immenses déceptions. D’autres liliacées remarquables font l’ornement du pays; les cordylines, souvent en masses pressées, attirent les regards par l’aspect singulier et par la beauté des fleurs. Une belle couleur jaune les dénonce à grande distance.

Jusqu’à l’époque de la grande invasion du nord de la Nouvelle-Zélande par les colonies anglaises, le voyageur, indifférent, et le navigateur, préoccupé des qualités de la mâture de son navire, semblent regretter de n’avoir pas de termes assez vifs pour dire la surprise, pour rendre l’émotion profonde qu’ils ont éprouvée en parcourant une forêt. C’est étrange, grandiose, superbe, et comme les conifères dominent, en toute saison c’est verdoyant. Les essences sont variées. Voici le pin rouge et le totara ou le pin noir[3], arbres d’un beau port, qui fournissent d’excellentes charpentes, puis des espèces assez voisines des cèdres[4], dont il existe des analogues dans l’Amérique occidentale; à côté, surtout dans les terrains marécageux, s’enchevêtrent des conifères de moindre dimension, des phylloclades d’espèces variées[5] ; en certains endroits, sur la teinte d’un vert foncé de la masse de la végétation, se détachent des

  1. Areca sapida.
  2. Phormium tenax.
  3. Podocarpus ferruginea, Podocarpus totara et quelques autres.
  4. Libocedrus.
  5. Phyllocladus.