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de la rivière James, qui avait été défaite par Beauregard et qui était fort pressée par le vainqueur; Grant, sachant Lee trop affaibli pour tenter un coup de main sur Washington, n’hésita pas à laisser ouverte la route de la capitale et continua son mouvement sur la gauche. Trouvant Lee dans une position trop forte pour qu’il fût possible de franchir en face de lui la rivière Anna, l’armée du Potomac continua sa marche et se retrouva dans cette péninsule où s’étaient livrées, deux ans auparavant, les premières grandes batailles de la guerre civile. Sur ce terrain, Grant ne fut pas plus heureux que ne l’avait été Mac-Clellan ; il ne put forcer la ligne du Chickahominy : après une attaque générale, où l’armée fédérale essuya des pertes considérables, Grant résolut d’agir contre Richmond comme il avait fait contre Vicksburg. Il fit passer le James à son armée et vint attaquer le camp retranché que Lee avait créé à Petersburg pour couvrir la capitale confédérée du côté du sud et la mettre à l’abri des attaques de l’armée que les unionistes avaient toujours maintenue à l’embouchure du James. Grant arriva devant Petersburg au commencement de juillet : les deux mois qui venaient de s’écouler et pendant lesquels presque chaque jour avait été marqué par un engagement, avaient coûté à l’armée du Potomac plus de 70,000 hommes mis hors de combat ou disparus. Lee s’était maintenu dans toutes ses positions, mais au prix de quels sacrifices ! Il était réduit à la défensive, et, loin de pouvoir venir en aide à ses lieutenans, il avait dû les affaiblir en appelant à lui une partie de leurs troupes. Le système du martelage commençait à produire ses effets.

Le siège de Petersburg, si l’on peut donner le nom de siège à une attaque contre une place qui n’était pas investie et qui ne pouvait l’être, devait durer neuf mois. Pendant que Lee était retenu par des attaques incessantes, les forces fédérales détruisaient les voies ferrées par lesquelles il pouvait être secouru, battaient et dispersaient les petits détachemens confédérés qui tenaient encore la campagne aux environs de Richmond, et Sheridan, à la suite de quatre combats heureux, se rendait maître de la vallée de la Shenandoah par laquelle les confédérés avaient, plus d’une fois, marché sur Washington : le cercle formé autour de Lee se resserrait de plus en plus ; aussi, après un assaut inutilement tenté, le 27 octobre, Grant suspendit toute opération active contre Petersburg et se contenta de continuer l’établissement de ses batteries en attendant le résultat de mouvement prescrit à Sherman. Celui-ci, conformément aux instructions qu’il avait reçues, était entré en Géorgie avec toutes ses forces : le général confédéré, Joe Johnston, accablé par le nombre, ne put lui fermer la route d’Atlanta. Sherman continua de marcher vers la mer, faisant avancer son armée en deux