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démarches qu’il fit dans l’intérêt des créanciers de Gotha. Il met tout en œuvre et en mouvement, rédige des mémoires, s’adresse à ses amis du bureau de la guerre, use de ses relations avec le marquis de Castries, fait parler au prince de Soubise, le tout, hélas ! sans succès. Ses efforts échouent contre la pénurie du trésor : « La réponse du bureau de la guerre n’est pas consolante, écrit-il, et, malheureusement, elle n’a que trop l’air d’être bien sincère. Tous ceux que je consulte là-dessus (et parmi lesquels je compte ceux qui sont particulièrement attachés à Votre Altesse sérénissime), me confirment dans la crainte que les engagemens contractés pendant la dernière guerre ne soient dans le cas de n’être jamais liquidés, les finances du royaume ne se trouvant pas dans un état assez florissant pour permettre de telles espérances. S’il s’est fait des traités entre des princes ou états de l’empire et des particuliers qui ont acquis leurs titres et prétentions à bas prix, c’est que ces gens-là ont vraisemblablement des moyens, et que l’intrigue sourde connaît des ressources que la négociation directe ne saurait employer ni se flatter de faire réussir[1]. »

Parmi les commissions dont Grimm se chargeait pour la cour de Gotha, il en était de moins sérieuses à la fois et de plus délicates. C’est à lui qu’on s’adressait pour les modes de Paris. Une « tête frisée, » destinée à la fille de la duchesse, avait voyagé avec le philosophe diplomate Helvétius, mais elle avait été mal emballée et avait souffert en route ; Grimm ne cache pas la joie maligne qu’il en a : c’est à lui qu’on aurait dû s’adresser. Il va en envoyer une autre, et il y joindra une considération : « On appelle ainsi, dit-il, les petits paniers qui ont succédé aux grands et qui soutiennent les robes sans donner aux femmes l’air d’avoir des paniers. » Grimm, dans une autre lettre, s’étend sur cet important sujet. Les paniers tendaient à disparaître, mais Madame la Dauphine et Mesdames de France n’avaient pas voulu les abandonner ; on continuait donc de les porter à la cour, tandis que le théâtre y avait renoncé et que la ville cherchait des compromis. « Ce qui les a ruinés de fond en comble, c’est qu’il n’était pas honnête autrefois de faire une visite sans panier, qu’on ne pouvait aller que chez ses plus intimes amies sans ce vêtement ample et roide, et qu’aujourd’hui on peut aller partout et même chez les princesses très honnêtement, non-seulement en considération, mais sans aucun panier et sans considération[2]. »

Sur l’article de la coiffure, Grimm, malgré sa « tête frisée, » paraît avoir mérité moins de confiance. Il vient de recommander

  1. Lettre du 6 mars 1764 (inédite).
  2. Lettre du 24 février 1766.