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et la marche de ses troupes, préparait les approvisionnemens, organisait les magasins et les hôpitaux. Envelopper dans un mouvement rapide la province de Hollande et la ville d’Utrecht, leur couper tout secours possible, s’emparer de toutes les places fortes du cordon, réunir contre Amsterdam toutes les troupes envoyées d’abord dans des directions diverses, tel était son projet primitif, tel fut le plan qu’il exécuta. Son armée, divisée en trois corps, s’ébranla comme pour la parade. Elle était forte de 20,000 hommes environ. Le duc s’était réservé le commandement de la première division, avec le général Knobelsdorf sous ses ordres. La seconde colonne avait à sa tête le général Gaudi. Le troisième corps obéissait au général Lottum.

Pour bien comprendre la marche du duc de Brunswick, la rapidité, la sécurité de ses mouvemens, il faut se rappeler que la Hollande, bien que très peuplée, n’occupe qu’une étendue peu considérable ; que toutes les grandes villes, très rapprochées, sont mises en communication par des canaux, par des routes sans nombre; que la distance entre Rotterdam et La Haye n’est que de cinq lieues, qu’elle n’est que de trois lieues entre La Haye et Leyde, de sept lieues entre Leyde et Haarlem. de cinq lieues entre Haarlem et Amsterdam ; qu’entre Utrecht et Amsterdam même, l’on n’a que huit lieues à parcourir.

Le 15 septembre, après un repos d’un jour, l’armée reprit sa marche en avant, les différens corps d’armée se dirigèrent vers les quartiers qui leur étaient assignés. Les soldats avaient une confiance absolue dans leur général, une foi aveugle dans le succès. Le temps, jusqu’alors fort beau, se mit à la pluie; les routes devinrent plus difficiles; raison de plus pour terminer rapidement une promenade militaire qui devait donner de la gloire. Le 16 septembre, une nouvelle se répandit qui mit le comble à leur enthousiasme : le rhingrave de Salm avait abandonné, dans la nuit, la ville d’Utrecht, qu’il devait défendre, et semait partout sur sa route le désordre et la confusion. Utrecht était livré à l’anarchie. Les corps francs erraient au hasard ; les bourgeois brisaient leurs armes, affolés par la colère et par la crainte; seuls, quelques officiers français, aidés de miliciens peu nombreux, s’efforçaient d’organiser une résistance inutile. « Le prince d’Orange est entré dans la ville au matin, écrivait sir James Harris. Il s’est emparé le même jour de Montfort et de l’entrée du canal. La province d’Utrecht tout entière est entre ses mains. » Le 18 septembre, M. de Saint-Priest voyait arriver à Anvers un sieur Leclercq. major du régiment de prince de Salm dans l’empire, qui lui annonçait la retraite précipitée du rhingrave : « On a abandonné toute l’artillerie à Woerden. La commission de Leurs Grandes Puissances partait aussi pour