aller encore. Il y a des momens où le secret s’échappe et la déplorable faiblesse éclate dans toute sa nudité. C’est ce qui vient d’arriver dans cette affaire de Loir-et-Cher, qui est bien un des plus singuliers spécimens des mœurs politiques et administratives du jour.
C’est simplement, on le remarquera, une querelle entre républicains acharnés à se disputer l’influence, les fonctions, avec la complicité du gouvernement. Quelques députés de Loir-et-Cher, M. Tassin en tête, se sont crus autorisés à se plaindre de M. le préfet Duflos, non pour son administration, mais parce qu’ils ne l’ont pas trouvé assez docile, assez dévoué à leurs intérêts électoraux. Quoi donc ! M. le préfet de Blois « n’avait pas craint d’assister à un banquet donné à des concurrens ! » Ces députés n’ont pu supporter cette hardiesse et, bravement, ils sont allés demander le déplacement de M. Duflos à M. le ministre de l’intérieur, qui s’est hâté de livrer son préfet, de promettre le déplacement qu’on lui demandait. Le ministre de l’intérieur, M. Sarrien, qui n’a rien à refuser à des républicains, a même écrit une lettre des plus humbles, en réclamant naïvement pour ses promesses le bénéfice du secret. C’était fort bien, M. Tassin et ses amis triomphaient ; ils avaient leur billet et ils attendaient impatiemment l’échéance. Comme le gouvernement tardait cependant à s’exécuter, les députés ont pris un grand parti : ils se sont mis en grève à l’ouverture du conseil général, ils ont déclaré qu’ils ne siégeraient pas tant que M. Duflos serait préfet de Blois ; et voilà la guerre allumée ! Alors le secret a éclaté. On a eu cette lettre de M. Tassin écrivant dans la confiance du succès : « J’attends le moment pour choisir mon préfet. » On a eu aussi la lettre de M. le ministre de l’intérieur mettant humblement les droits du gouvernement au service des députés républicains. On a eu sous les yeux tout ce trafic d’influences, de fonctions pour des fantaisies et des intérêts personnels. Et notez bien que ce qui arrive à Blois se passe un peu dans toutes les régions, à tous les degrés de la hiérarchie. Dans le Tarn, ce sont des membres d’un conseil de révision qui sont dénoncés parce qu’ils ne sont pas assez complaisans pour des fils d’électeurs républicains. A Lyon, ce sont des députés qui se mêlent sans façon aux œuvres de la justice. Ce qui en résulte de plus clair, c’est un régime où tout s’altère, où les députés, s’ils sont républicains, sont les maîtres et prétendent mettre la main sur tout, où il n’est pas un fonctionnaire, depuis le préfet jusqu’à un simple buraliste, qui soit à l’abri des délations et des épurations. C’est la désorganisation croissante, et quand on croit tout pallier en publiant comme un bulletin de victoire les résultats du récent emprunt, on se paie d’une vaine équivoque. Sans doute, le pays qui travaille a toujours des ressources pour soutenir son crédit. Il vit de lui-même, par lui-même, en dépit des partis qui l’exploitent et des ministères qui laissent dépérir toutes les forces régulières de