et si le gouvernement n’avait pas commencé par capituler devant les radicaux ; mais, de plus, qu’elle soit posée ou non, quelle compensation, quelle sûreté espère-t-on trouver dans la politique d’exclusion ? où en sera-t-on le lendemain ? Est-ce que l’éloignement des princes, fût-il sottement décidé, a une efficacité politique ? c’était bon autrefois, lorsque Louis XVIII était à l’extrémité de l’Europe, à Mittau, ou dans un vieux château au fond de l’Angleterre, sans communication avec la France, — lorsqu’il n’y avait ni les chemins de fer, ni le télégraphe, ni la presse. Aujourd’hui, les frontières existent à peine, les distances sont supprimées, une nouvelle court le monde en quelques heures. Les princes peuvent souffrir de l’exil, ils n’en sont pas diminués, ni moins présens politiquement. Ils sont désignés par la persécution, représentés par leurs amis en France. C’est une brutalité sans profit. On n’en est pas plus avancé, on reste tout aussi menacé parce qu’en définitive, le danger pour la république n’est pas dans la présence des princes à Paris, à Chantilly ou à Eu.
Non certes, le vrai danger pour la république n’est pas dans les princes, il est dans les républicains eux-mêmes, acharnés à ruiner un régime qu’ils croient faire vivre en lui créant les conditions d’une vie impossible. Il est dans cette politique qui, depuis quelques années, semble se faire un jeu de tout désorganiser et de tout ébranler, de subordonner les intérêts, les institutions, les traditions, la justice, l’armée, l’administration, l’industrie du pays, aux passions et aux calculs de parti. Le danger réel, pressant, il est dans l’instabilité qu’on met partout, dans l’abus de la fortune nationale, dans la complaisance pour toutes les idées d’anarchie, dans la réhabilitation de tout ce qui est insurrection et révolution. On l’a vu ces jours passés encore par cette première séance de la session nouvelle, par cette discussion aussi étrange qu’imprévue sur la révolution de février qui a été comme le prologue de la proposition de la loi d’exil, et qui avait pour objet d’allouer des pensions aux survivans des blessés ou des combattans.de 1848. Le moment était, en vérité, bien choisi, lorsqu’on ne sait comment combler les déficits, lorsqu’il faut demander de nouveaux impôts aux contribuables, — et c’était de plus de l’argent bien placé ! s’il est, en effet, une journée malvenue dans l’histoire, inutile au moment où elle s’est accomplie, féconde en désastres pour l’avenir, c’est cette journée du 24 février qui a été, l’autre jour, le thème de déclamations passablement surannées. Les révolutions sont toujours sans doute des révolutions, c’est-à-dire des événemens redoutables ; il en est du moins que les circonstances justifient ou expliquent : celle du 24 février 1848 a précisément le caractère de s’être accomplie sans raison et sans nécessité contre un gouvernement qui tombait en respectant les lois jusqu’au bout, qui se prêtait, par le jeu même des institutions, à tous les progrès sérieux, et qui, après dix-huit ans de règne, laissait la France