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et que le dernier emprunt a eu pour objet de les satisfaire. Il est à peine besoin de dire qu’aucune dette de l’état n’est en souffrance : que seulement le trésor, dans ses écritures, continue et continuera jusqu’à la fin des siècles d’inscrire au débit de chacun des exercices qui se sont clos par un déficit un découvert égal à la portion de ce déficit qui n’a pas été éteinte par une rentrée équivalente, recette ou emprunt. A quel badaud d’ailleurs pouvait-on espérer de faire croire qu’en remboursant les 230 millions de bons du trésor émis par M. Sadi-Carnot, du 1er janvier au 1er mars 1886, ou les 100 millions d’avances des trésoriers payeurs généraux, la république éteignait une dette de la restauration ou de l’empire ? On était d’autant plus malavisé de soulever une discussion sur ce point qu’il en pouvait facilement sortir un argument contre le régime actuel. Le gouvernement de juillet figure dans le total des découverts pour 492 millions, c’est-à-dire pour près des 5 septièmes, parce qu’il a appliqué à la construction des premiers chemins de fer la dotation de l’amortissement, dont il continuait à se reconnaître débiteur dans les écritures ; ce chiffre eût été réduit de plus de moitié par l’emprunt du 10 novembre 1847, dont les versemens profitèrent au régime suivant. Ce régime était la république, qui, en trois années, aurait ajouté 372 millions aux découverts du trésor si elle ne s’était pas approprié plus de 300 millions, provenant tant de l’emprunt du 10 novembre 1847 que des fonds des caisses d’épargne. Grâce à la consolidation de ces dépôts, transformés en rentes et mis à la charge de la dette perpétuelle, la part de la république de 1848 dans les découverts du trésor, s’est trouvée réduite de 372 millions à un peu moins de 30. La part du second empire, après dix-huit ans de durée et un immense développement donné aux travaux publics, est de 53,244,149 francs, mais il convient de faire observer que le dernier exercice complet de ce régime, celui de 1869, s’est soldé par un excédent de recettes de 57,973,567 francs, qui faisait plus que compenser le découvert des exercices antérieurs et qui aurait dû être appliqué à l’éteindre ; mais il ne pouvait convenir à M. Thiers qu’il résultât des écritures du trésor que la gestion financière de l’empire, fort critiquée par lui, s’était soldée par un boni de 4 millions. Il y mit ordre par un artifice de comptabilité, et l’excédent de recettes de l’exercice 1869 fut appliqué à la première partie du compte de liquidation, de même que les 104 millions provenant de la caisse d’amortissement, qu’il s’empressa de supprimer. Un découvert de 53 millions est donc demeuré au compte du second empire, mais ce chiffre ne paraîtra point excessif, si on le met en regard des 431 millions du découvert créé par le gouvernement actuel depuis 1881. Il eût été prudent à M. Sadi-Carnot de consolider ou de faire