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ils commencèrent les recherches. Elles furent des plus fructueuses ; partout, sur un rayon d’une lieue carrée, dans la plaine, dans les sables, dans les ravins et jusque dans le lit des ruisseaux on recueillit des pierres semblables aux échantillons produits à San-Francisco. Minutieusement examinées par des hommes du métier, elles furent reconnues être des pierres fines.

Les capitalistes, au nombre d’une douzaine, aux frais de qui l’expédition avait été faite, n’hésitèrent plus. Ils offrirent aux mineurs 5 millions comptant et une part dans les bénéfices. Après bien des pourparlers l’affaire fut enfin conclue, et les promesses d’actions atteignirent tout de suite des prix fabuleux. Les choses en étaient là et l’on préparait le matériel de l’exploitation quand le rapport d’un expert de Philadelphie vint glacer l’enthousiasme. De l’examen des localités et de la nature du sol il concluait que les gisemens n’existaient pas et qu’on se trouvait en présence de salted deposits (champs salés) ou artificiellement ensemencés de pierres fines. Une enquête minutieuse révéla, en effet, que ces filous avaient acheté à Londres et à New-York pour environ 250,000 francs de diamans et de rubis bruts, plus ou moins défectueux, mélangés de quelques belles pierres et qu’ils les avaient semés sur le sol des anciens Aztèques. Il va sans dire qu’une fois en possession de leurs millions, ils avaient quitté la Californie et qu’on ne les y revit jamais.

Le traitement des minerais de la Californie nécessite l’emploi du mercure en quantités très considérables, et par une heureuse coïncidence la Californie possède des mines importantes de mercure, au premier rang desquelles figure celle connue sous le nom de New-Almaden. Elle est située à 16 milles au sud de l’extrémité de la baie de San-Francisco, dans un des contreforts du Coast-Range, chaîne de montagnes qui court le long du littoral. Cette mine était connue des Indiens, qui en utilisaient le cinabre pour leurs tatouages. Le filon serpente dans une roche verte ; en certains endroits il mesure plusieurs centaines de pieds d’épaisseur, en d’autres, il s’amincit et se réduit à presque rien. Sa direction constante est du nord au sud. On détache le cinabre, on le brise en morceaux et on l’empile, ainsi concassé, dans un vaste récipient pouvant contenir jusqu’à vingt-cinq tonnes de minerai. Soumis pendant quatre jours à une chaleur intense, le mercure mélangé de soufre se volatilise et passe à travers un appareil de condensation dans lequel il se liquéfie ; le soufre converti en gaz sulfureux disparaît par la combustion. En vingt-quatre années New-Almaden a produit 45,000,000 de livres de mercure ou 60,000 fiasques. La mine de Fresno en produit 6,000 et celle de Napa 7,000 annuellement.

D’un prix très élevé au début de l’exploitation des mines d’or, le mercure a subi depuis une dépréciation considérable grâce à laquelle