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il a pu lutter avec avantage contre le mercure importé et même lui faire une concurrence telle que les mines d’Italie : Levigliani et Ripa en Toscane, et celles de Huancavelica au Pérou ont vu cesser leur exploitation. Seule, la mine d’Almaden en Espagne a pu se maintenir, et si le marché de la Chine lui a été enlevé par sa rivale californienne, elle lui dispute encore celui du Mexique.

Enfin, pour compléter la liste des richesses minières du pays de l’or et de l’argent, notons les houillères de Monté del Diablo, qui fournissent par an 175,000 tonnes de combustible, celles du nord qui en donnent 75,000, soit en tout 250,000 tonnes, la moitié de la consommation locale ; le surplus est fourni par l’Australie, les États-Unis et l’Angleterre. De grands dépôts de soude et de borate, de soufre, de minerais de fer ont été reconnus et sont exploités. Chaque jour la Californie s’affranchit du tribut qu’elle payait à l’étranger et devient un centre de production et de fabrication.


III

Tant de progrès réalisés, tant d’épreuves heureusement franchies, une prospérité sans égale, un avenir sans limites, semblaient devoir lasser la fortune inconstante. En quelques années, San-Francisco avait pris un développement prodigieux ; partout de somptueuses résidences, de vastes magasins, des églises, des quais énormes, attestaient l’énergie et la richesse de ses habitans, leur foi désormais inébranlable dans l’avenir de la métropole du Pacifique. L’année même où la production de l’or semblait faiblir et où l’exportation du précieux métal baissait de 10 millions, les mines d’argent venaient combler et au-delà cette lacune et ajouter 30 millions en argent aux 200 millions que les vapeurs de Panama emportaient en 1861. Le recensement constatait, pour l’état, une population de 380,000 habitans, pour San-Francisco de 57,000. L’immigration continuait, non plus avec la fièvre des premiers jours, mais régulière et constante, par la voie de l’isthme. Mais cette voie plus rapide ne satisfaisait pas encore l’impatience des habitans de San-Francisco. En attendant, la construction du grand chemin de fer transcontinental on décida d’organiser un service de courriers à cheval. La distance à franchir, de Saint-Joseph du Missouri, point extrême de la voie ferrée du côté de l’Atlantique, et Sacramento, était de 1,900 milles, environ 3,000 kilomètres, à travers les déserts, les sierras et les prairies. On réussit à la franchir en deux cent-cinquante heures, dix jours et demi, avec une vitesse moyenne de 8 milles à l’heure, chaque cheval fournissant une course de 24 milles. Le Pony express, comme on appela ce nouveau service, partait deux fois par semaine ; le maximum des lettres dont le