des conservateurs, des libéraux, des radicaux et des nationalistes irlandais, et il est probable qu’il eût fourni une carrière honorable, plus ou moins utile au pays, comme la plupart des parlemens ses prédécesseurs, si M. Gladstone, dans l’enivrement intellectuel de sa toute-puissance sur les imaginations britanniques, ne s’était cru assez fort pour lancer les chambres et le pays dans une entreprise révolutionnaire ; s’il n’avait proposé à l’improviste une mesure irlandaise équivalant, aux yeux de la majorité de ses concitoyens, à une séparation complète de l’ile sœur, à la ruine de l’unité de l’empire.
M. Gladstone a, dans ces circonstances, mal compris le génie populaire. Il s’est trop flatté de pouvoir dompter les esprits comme il régnait sur les cœurs. Il n’a tenu compte ni des répugnances instinctives, ni des préjugés enracinés, ni de la ténacité des opinions admises. Il a dédaigné de prendre l’avis de ses conseillers habituels, de ses collaborateurs assidus. Il a cru qu’il lui suffirait de s’écrier, à propos du sort à faire à l’Irlande : « Je vois, je sais, je crois ! » pour que toute l’Angleterre eût aussitôt la même clairvoyance, la même compréhension, la même foi. Il s’est trompé, et il paie aujourd’hui cette erreur en même temps qu’il l’a fait payer à l’Angleterre par une dissolution survenant moins d’une année après les élections générales. Aussi ce parlement de 1885, le premier sous l’empire de la nouvelle loi électorale, n’a-t-il pas siégé six mois. Pareil spectacle ne s’était encore vu que deux fois dans le cours du siècle. L’histoire ne dira pas le parlement, mais les parlemens de 1883. Toute cette agitation, d’ailleurs, a été en grande partie factice. Sans doute, le régime électoral nouveau venait de donner occasion à l’Irlande d’envoyer quatre-vingt-cinq représentai autonomistes à la chambre des communes. C’était une raison majeure pour s’occuper avec sollicitude des revendications des Irlandais, pour appeler l’attention de l’Angleterre sur la gravité de la question à résoudre. Ce n’était pas une raison pour passer avec armes et bagages dans le camp des irréconciliables, tenter d’y entraîner avec soi, en même temps que le prestige et la dignité du gouvernement, toute la force de la majorité parlementaire et vouloir faire capituler les cinq sixièmes de la chambre des communes devant le dernier sixième.
Vaincu dans le parlement, M. Gladstone n’a pas accepté sa défaite ; il a aussitôt fait appel des nouveaux élus aux électeurs, entamé une campagne de dénonciation violente contre ses amis de la veille devenus ses adversaires d’aujourd’hui, sommé en quelque sorte la Grande-Bretagne de sanctionner ses procédés révolutionnaires. Le scrutin de juillet 1886 a répondu par une condamnation catégorique de l’homme ainsi que du système autoritaire de