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Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 79.djvu/350

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Le 17, les ennemis étaient entre Grasse et Cannes, et leur flotte au mouillage des îles d’Hyères.

Les acteurs principaux du drame qui va se jouer sont d’abord le maréchal de Tessé qui commande l’armée et dont le quartier-général était en Dauphiné au commencement de la campagne. Il a sous lui, pour lieutenans-généraux, Goësbriant, Bezons et Dillon, enfin Médavy, qui vient de ramener en France le corps d’occupation du Milanais, aux termes d’une suspension d’armes, négociée avec le prince Eugène, par M. de Saint-Pater, lieutenant-général. Celui-ci est gouverneur de Toulon et le marquis de Langeron commande la flotte. Vauvré est à la tête de l’artillerie et Lozières d’Astier, envoyé d’Antibes, est le chef du génie. Le Bret est à la fois premier président et intendant de Provence et le comte de Grignan, lieutenant du roi et gouverneur. Tous concourent au même but et s’accordent sur le plan adopté ; mais ce sont des récriminations sur ce que rien n’est prêt et que tout reste à faire. Chamillart est assourdi de tant de plaintes, et, dans celles de Tessé, il est difficile de ne pas voir percer l’intention de rapporter à lui seul tout le résultat et de déprimer le comte de Grignan, qui, lui, demeuré plus calme, n’exagère rien, expose au ministre le véritable état des choses, et, en fin de compte, réussit à garder sa confiance. Il la mérite, d’ailleurs, par la droiture de ses idées, son activité réfléchie et sa résolution d’utiliser les élémens dont il dispose, tout en les appréciant à leur juste valeur. Le comte de Médavy est de tous le plus mal disposé : il écrit de Grenoble à Pontchartrain pour se plaindre de l’insuffisance des généraux et des complaisances dont M. de Grignan a été l’objet de la part du roi ; mais Pontchartrain réplique durement : il lui rappelle ses propres erreurs et considère M. de Grignan comme plein de bonne volonté et capable plus que personne de profiter des conseils qu’on lui aura donnés.

Une lettre postérieure de Dillon nous apprend que Tessé, qui commandait l’armée le long des frontières du Dauphiné et de la Savoie, en était parti le à juillet avec Angervilliers pour intendant. Médavy, invoquant des prétextes, est encore en Savoie ; il est aigri, mécontent, il se dit malade ; au fond, il hait Grignan et veut éviter le roulement, c’est-à-dire l’éventualité de lui obéir à titre de plus ancien. Médavy est cependant mis expressément à la disposition de Tessé; après de nouveaux retards, il quitte Grenoble le 22 juillet; il est encore en marche au commencement d’août, amenant des renforts; il arrive enfin le 5 au camp de Roquevaire[1]. Nous le retrouvons le 12 au camp de Seillon, près de Saint-Maximin, poste

  1. Petite ville à 15 kilomètres de Marseille, sur la route de Toulon.