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Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 84.djvu/789

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« Dès le mois de septembre, — écrivait-il au maréchal Soult le 28 juin, à peine rentré à Mostaganem, — la division d’Oran reviendra à Mascara avec un grand convoi. Elle trouvera dans ses magasins les grains qu’elle y a déposés et qu’elle va y déposer encore ; elle trouvera l’établissement perfectionné, des moulins établis avec les meules que nous avons enlevées à quelques lieues de Mascara ; elle pourra alors parcourir tout le pays à deux ou trois marches à la ronde et vider des silos, parce que la contrée est réellement fertile en grains. Ainsi la division d’Oran aura pour la première fois, en Afrique, appliqué le grand principe de faire vivre la guerre par la guerre. » En conséquence, avant de se rembarquer pour Alger, le gouverneur prescrivit au général de La Moricière de conduire à Mascara, sans retard, un nouveau convoi, d’y moissonner jusqu’au 20 juillet, puis de revenir à Mostaganem, et de laisser reposer les troupes pendant les mois d’août et septembre. Ces ordres furent exécutés.

Le 5 juillet, La Moricière était à Mascara, et la moisson recommença le 6. Le 13, à deux lieues au nord- est de la ville, il y eut un engagement sérieux auprès du marabout de Sidi-Daho. Soutenus par les cavaliers rouges de Moustafa-ben-Tami, les Arabes, dont on allait enlever les récoltes, se ruèrent sur les moissonneurs ; les bataillons de garde les arrêtèrent, puis, en quelques minutes, l’ordre de travail changé en ordre de combat, La Moricière prit l’offensive ; zouaves, spahis, chasseurs d’Afrique, s’élancèrent, débusquèrent l’ennemi des hauteurs qu’il occupait et le poursuivirent deux heures durant dans la plaine. La température était excessive ; les troupes, haletantes de chaleur et de fatigue, avaient besoin de repos. Déduction faite des grains qu’elles avaient consommés, l’approvisionnement de la place s’était accru de 300 quintaux métriques de blé et de 1,500 quintaux de paille. Le 15 juillet, La Moricière donna le signal du départ.

Abd-el-Kader et trois de ses khalifas, Bou-Hamedi, Ben-Tami, Miloud-ben-Arach, s’étaient réunis pour lui disputer la retraite ; après trois jours de combat, la division rentra, le 19, à Mostaganem ; elle avait eu 106 blessés et 13 morts.

« Il ne faut pas se dissimuler, écrivait le gouverneur au maréchal Soult, que les Arabes, ayant toujours attaqué et poursuivi notre colonne jusqu’à deux lieues de Mostaganem, compteront cela comme une victoire, bien qu’ils ne nous aient pas fait un prisonnier ni pris un seul cadavre. Abd-el-Kader, qui est le plus habile menteur du monde, publiera ce prétendu triomphe dans toute l’Algérie et jusque dans le Maroc. Il n’est pas moins certain que cette illusion remontera un peu ses affaires, en amoindrissant la terreur que nous avons imprimée aux tribus. Si nous étions dans