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Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 85.djvu/796

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avait gagné une petite éminence à 500 ou 600 mètres en arrière ; elle essaya d’y tenir avec 150 ou 200cavaliers réguliers ; mais, traversée immédiatement par la charge des spahis et du maghzen, elle fut de nouveau culbutée. En ce moment la déroute fut complète ; fantassins et cavaliers cherchèrent leur salut dans une fuite précipitée. On les poursuivit pendant deux lieues, et l’on ne s’arrêta que quand il n’y eut plus personne à combattre.

« Deux cent cinquante cadavres au moins furent abandonnés par l’ennemi; 140 fantassins et cavaliers réguliers furent faits prisonniers. Plus de 00 fusils, les caisses des tambours du bataillon régulier, des sabres, des pistolets, des chevaux, 150 chameaux et un des 5 drapeaux qui étaient portés en avant de l’émir tombèrent en notre pouvoir. Le maghzen, les Assasna et les Ouled-Brahim, — qui montrèrent autant d’ardeur dans la poursuite que de mollesse dans l’attaque, — firent un butin considérable : 60 ou 80 mulets chargés, 300 chameaux, 110 chevaux harnachés et le troupeau qui devait servira la nourriture des réguliers, furent enlevés par nos alliés. L’émir serait bien certainement sous ma tente aujourd’hui si les Assasna et les Ouled-Brahim avaient donné comme les spahis et le maghzen d’Oran. Abd-el-Kader ne pouvait s’échapper.»

Battu à Djidda le 22 juin, Abd-el-Kader apparaissait subitement le 30, au point du jour, sous les murs de Mascara, au faubourg d’Argoub, devant Bab-Ali. Grand émoi dans la place; le colonel Géry n’y avait laisse que 250 fantassins et 20 spahis ; ajoutez à cette poignée d’hommes 15 chasseurs d’Afrique sortant de l’hôpital, 5 gendarmes et quelques officiers de passage, voilà toute la force dont pouvait disposer le chef de bataillon Bastouil, assisté du commandant de Martimprey ; mais chacun fit son devoir; le coup de main échoua et l’émir se mit en retraite.

Les lieutenans d’Abd-el-Kader s’étaient, comme lui et d’après ses ordres, remis en campagne. Le 3 juillet, le général Bugeaud, qui manoeuvrait dans la vallée de l’Oued-Biou, apprit que Ben-Allal et Ben-Tami étaient campés, cinq lieues plus haut, afin d’arrêter le torrent des soumissions entraînées les unes par les autres. Il fit aussitôt partir, sous les ordres du lieutenant-colonel Leflô, un bataillon de zouaves, le 5e bataillon de chasseurs du commandant Canrobert et 70 chasseurs d’Afrique. A trois heures du matin, la petite colonne ne trouva plus que les feux à demi éteints du campement. On se mit sur les traces de l’ennemi; mais il se trouva bientôt que la piste devenait double. Le lieutenant-colonel prit le parti dangereux de suivre à la fois les deux branches, et par conséquent de diviser sa troupe ; il envoya le commandant Canrobert à droite et poursuivit à gauche avec les zouaves. A peine avait-il fait une heure de chemin qu’il se trouva en présence des khalifas bien