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on reconnaît que l’Association végétale dont nous venons d’esquisser le tableau, et qui couvrirait d’une futaie continue l’Europe centrale, si notre continent n’eût pas été envahi par la culture, ne se retrouve sur le versant méridional des Alpes, des Pyrénées et du Caucase qu’à l’état d’exception, à la faveur de l’altitude ou grâce à des conditions spéciales de fraîcheur. son caractère principal ne résulte pas seulement d’une réunion d’espèces déterminées, mais il tient surtout à la caducité hibernale des feuilles. Le houx, le buis et le lierre, qui font également partie de l’ association végétale méditerranéenne, font à peu près seuls exception à cette caducité générale ; elles arbres, dépouilles dans l’automne de chaque année, se couvrent au printemps d’une verdure nouvelle, délicate et fraîche, périodiquement renouvelée.

L’association forestière qui suit et qui se juxtapose brusquement à la précédente, en Provence comme en Istrie, emprunte son nom à la Méditerranée, dont elle occupe le pourtour entier, du versant des Alpes au grand Allas, de l’embouchure du Tage au Taurus et au Liban. Sur toutes les plages à l’intérieur de ce périmètre, une flore forestière sensiblement pareille couvre des mêmes essences un sol généralement accidenté, sous un climat sec et chaud, bien que soumis à de violens contrastes, selon l’exposition, selon les stations, enfin selon les latitudes échelonnées du 44e au 32e degré, des environs d’Orange aux contins du Sahara, et de Lisbonne au fond de la Tunisie ou de la Palestine. Les chênes verts, d’autres chênes encore à feuillage semi-persistant, le laurier, l’olivier, le grenadier, les térébinthes, certains érables, le laurier-rose et le caroubier, une foule d’arbustes à feuilles persistantes ; lauriers-tin, arbousiers, filarias, daphnés, bruyères, cistes, etc., contribuent à l’ordonnance de cet ensemble, qui frappe d’autant plus qu’une étonnante richesse de détails caractéristiques se dérobe sous son apparente uniformité.

La flore méditerranéenne serait trop superficiellement défraie si l’on se bornait à un simple coup d’œil. Elle demande, au contraire, un examen plus approfondi des élémens qu’elle renferme, dès que l’on a la pensée de rechercher l’origine de ces élémens. À ce point de vue, sa complexité même ajoute encore à l’intérêt de cette recherche. — D’abord, à côté des arbres feuillus qui lui sont propres, l’association comprend des résineux spéciaux. Les plus couvrent à eux seuls de grandes étendues, et l’un d’eux, le pin d’Alep, est aussi caractéristique, c’est-à-dire aussi universellement répandu, que les yeuses parmi les types feuillus. A côté du pin d’Alep se rangent les laricios, les pins maritimes et plus à fruit, ayant chacun leurs stations et leur rôle déterminés. Ces résineux, auxquels il faut joindre