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Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 86.djvu/394

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Beau l’Obier, cède à la tempête !
Faiblesse désarme fureurs ;
Sous les autans, courbe la tête.
Ou bien, c’en est fait de tes fleurs.
………………

Rosier, prends soin de ton feuillage,
Sois toujours beau, sois toujours vert,
Afin que voye, après l’orage.
Tes fleurs égayer mon hiver. »


Cette romance, quoique imprimée dans les œuvres complètes du chevalier de Boufflers, était bien de Mme de Sabran ; et sa fille avait gardé précieusement le manuscrit avec une fleur fanée. Ce souvenir touchant ne fit qu’aviver toutes ses plaies. La fidèle servante, Nanette Giblain, résolut de faire sortir sa maîtresse de prison. Elle alla chez Dyle, marchand de porcelaine, où travaillaient des ouvriers jadis employés à une manufacture fondée par le général de Custine, à Nidervillers, dans les Vosges. Cette fabrique avait été confisquée comme tous ses autres biens. Les ouvriers étaient venus chercher de l’ouvrage à Paris, chez Dyle. Parmi eux se trouvait le père de Nanette Giblain, Pierre Malriat.

Ils signèrent tous une pétition dans laquelle ils demandaient l’élargissement de Mme de Custine, et ils l’apportèrent à l’ancien boucher Legendre, président du bureau, chargé de statuer sur les pétitions[1]. Jetée dans le casier, elle eût été oubliée peut-être ; mais un soir les jeunes gens attachés au bureau comme secrétaires, et dont un s’appelait Rossigneux, l’ayant laissée tomber par hasard sur leur tablé, la furent et jurèrent de la présenter le soir même à Legendre pour sauver « la belle Custine, une seconde Roland. »

Legendre, un peu aviné, rentrait chez lui à une heure du matin. La demande de mise en liberté de la citoyenne Custine lui est présentée ; il la signe, et à trois heures du matin, les jeunes secrétaires frappent à la porte de la cellule de la prisonnière. Elle était seule ; elle ne voulut pas ouvrir à cette heure-là. Le lendemain 13 vendémiaire an III, l’arrêté d’élargissement lui était notifié. Il est ainsi conçu :


CONVENTION NATIONALE
Comité de sûreté générale et de surveillance.

« Vu les pièces relatives à la citoyenne Custine, détenue aux

  1. Voyez la Russie en 1839, par A. de Custine, lettre III.