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Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 86.djvu/395

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Carmes, le comité arrête que ladite Custine sera mise en liberté et les scellés levés au vu du présent arrêté.

« Signé : Les représentans du peuple

« LEGENDRE, LESAGE, SENAULT, CLAUEL, MERLIN, COLLOMBEST, LOUIS (du Bas-Rhin).

« Pour copie conforme :

« DUMONT, greffier[1]. »


Et comme si, jusqu’à la sortie de prison, Gérôme devait se montrer dévoué, nous lisons au-dessous de l’arrêté :

« Nous, administrateurs de police régénérée, certifions les signatures ci-dessus sincères et véritables. À Paris, le 17 vendémiaire, troisième année républicaine.

« GERÔME ALBERT. »


Mme de Custine rentre seule dans sa maison dévastée, sans vêtemens, sans ressources ; elle y retrouve, pour se reprendre à vivre, son enfant de trois ans, d’une santé délicate. Que va-t-elle devenir ?

On faisait, après le 9 thermidor, une sorte de trafic des mises en liberté : une foule d’intrigans rançonnaient, api es leur élargissement, les malheureux prisonniers déjà ruinés par la révolution. Une grande dame, alliée d’assez près à Mme de Custine, n’eut pas honte de lui demander 30,000 francs, qu’elle avait dépensés en corruptions, disait-elle, pour obtenir sa sortie de prison. Delphine répondit en racontant l’histoire de Rossigneux, et elle ne revit jamais sa parente[2].

Une autre série de douleurs commença pour elle. Jusqu’alors, le souffle héroïque, la grandeur du sacrifice avaient soutenu son corps et sa volonté ; mais elle ne put résister aussi vaillamment à la solitude et à la pauvreté. La jaunisse se déclara le lendemain de son retour chez elle ; la maladie dura cinq mois, et il lui en resta une affection du foie dont elle souffrit toute sa vie. Au bout de l’année, elle recouvra quelque argent et se mit en quête d’appuis pour réunir les lambeaux de l’opulente fortune de la famille de Custine.

À la suite de la confiscation, la majeure partie des biens du général avait été vendue ; sa belle-fille commença alors ses démarches :

  1. Voyez Archives nationales.
  2. Voyez la Russie en 1839, lettre III.