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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 avril.

Non, sans doute, il n’y a, il ne peut et il ne doit y avoir rien de vulgaire dans ces fêtes qui se préparent, dont la première réveille de grands souvenirs et va préluder à un des plus grands spectacles du travail contemporain. A mesure qu’on approche de cette date du 5 mai, centième anniversaire de cette autre journée de 1789, où pour la première fois depuis plus d’un siècle et demi les représentans des divers ordres de la France se rassemblaient en états-généraux dans la Salle des Menus à Versailles, on ne peut se défendre d’un sentiment aussi sérieux que profond. C’est de là, en effet, c’est de cette date du 5 mai 1789 que tout découle depuis un siècle; c’est alors que commencent tous ces événemens, la fusion des classes, la transformation sociale et politique de la France, la promulgation des droits, l’avènement d’un esprit nouveau parmi les peuples, tout ce qui, en un mot, s’est appelé la révolution française. Assurément, chez tous ces hommes qui, la veille encore, représentaient les trois ordres dans la Salle des Menus et qui le lendemain s’appelaient déjà les représentans de la nation, qui allaient s’emparer de la puissance publique, il y avait bien des illusions, bien des idées fausses ou chimériques, une dangereuse et meurtrière inexpérience, lis gardaient néanmoins à travers tout, ces ouvriers de la première heure, un sentiment élevé et généreux, la volonté du bien, des instincts libéraux. C’étaient des réformateurs imprévoyans, mais sincères qui se croyaient naïvement les régénérateurs de leur nation, même de l’humanité, et c’est ce qui fait que cette année 1789 reste au-dessus de toutes les autres la grande date moderne, moins encore peut-être par les œuvres qu’elle a réalisées que par les principes dont elle est la représentation idéale, par les semences qu’elle a répandues dans le monde.

Le malheur est que cette date, objet des commémorations d’aujourd’hui, n’est pas la seule dans l’histoire, qu’à peine commencé, le drame