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Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 94.djvu/448

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La Tour et la galerie des machines nous enseignent ce que peut le fer, réduit à ses seules ressources. Mais l’emploi exclusif de ces grands réseaux métalliques ne répond qu’à des besoins exceptionnels ; pour beaucoup d’autres usages, le fer doit recourir à des matériaux auxiliaires. C’était un nouveau problème de déterminer le choix et les conditions esthétiques de ces alliances. On s’est appliqué à le résoudre dans les deux palais jumeaux des Beaux-Arts et des Arts libéraux ; et l’on est revenu à la plus ancienne tradition hellénique, le mariage du bois et de la terre cuite peinte, tel que nous le retrouvons dans les premiers temples de Métaponte, mais en remplaçant le bois par le fer. La réussite est éclatante. Ici le goût le plus sûr et le plus inventif a dirigé la collaboration du fondeur, du potier et du céramiste. Je ne sais ce qu’il faut le plus louer dans ces édifices : la juste répartition du fer et de la brique, inspirée, semble-t-il, par la structure du corps humain, avec ses os visibles sous la chair ; l’ornementation légère et sobre, dont la terre cuite et l’émail font seuls les frais ; la polychromie discrète, où prédominent deux tous : le bleu doux du fer, le rose tendre de la brique. Maintenue dans ces gammes, la coloration des surfaces métalliques justifie la prédiction de Beulé : « Si un jour nous reprenons le goût des édifices peints, nous ne mériterons point le nom de barbares ; nous aurons reconquis, au contraire, un héritage auquel nous avions renoncé, une beauté que nous avions perdue[1]. »

Tout d’abord, on a remarqué dans cet ensemble les dômes de tuiles vernissées, heureux emprunt fait aux vieux maçons de l’Iran. Nos premières reconnaissances en Asie centrale, et en particulier les belles découvertes de M. Dieulafoy, auront une influence sensible sur le renouveau architectural. Ces coupoles d’émail, qu’on dirait colorées aux reflets de l’azur céleste où elles montent, je les admirais, l’an dernier, sur les médressés des Tamerlanides et sur les mosquées en ruines de la frontière persane ; il me sembla que j’en rapportais le mirage, lorsque, en rentrant dans Paris, je les revis déjà posées sur les palais des Arts. Il ne reste qu’à mêler aux dessins géométriques, un peu secs, les fleurs

  1. Histoire de l’art grec. — La polychromie.