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et voici ce qui se fit dans Jérémie (3-18), : « En ce temps-là, la maison de Juda ira avec, la maison : d’Israël ; elles viendront ensemble du pays du nord au pays dont j’ai donné la possession à leurs pères. » Et ailleurs (31-1) : « En ce temps-là, je serai un dieu pour toutes les familles d’Israël et elles me seront un peuple… Je redeviens pour Israël un père, et Éphraïm m’est un premier-né… tous viendront chanter sur la montagne de Sion. »

Et cette nouveauté a inspiré au poète un admirable passage (31-15) : « Ainsi dit Jéhova : une voix est entendue dans Rama, une lamentation, des pleurs amers, Rachel gémissant sur ses enfans : elle ne veut pas être consolée de ses enfans, car elle ne les a plus. Ainsi dit Jéhova : Épargne à ta voix les lamentations et les pleurs à tes yeux… car ils reviendront. » À Rama était le tombeau de Rachel et Rachel est à la fois la mère de Joseph et de Benjamin ; c’est-à-dire, Joseph étant le père d’Ephraïm, qu’elle est à la fois l’aïeule des deux portions d’Israël et que jusque-là, dans son tombeau, elle faisait le deuil de tout un peuple.

Enfin le prophète annonce, toujours comme Isaïe, que les peuples, émerveillés de ce que Jéhova a fait pour les siens, affluent à Jérusalem pour rendre à ce grand dieu leurs hommages (16-29 et 17-26).

Les prophéties qui se rapportent aux choses du dehors sont aussi les mêmes que dans Isaïe. On y retrace aux chapitres XLIII-XLVI l’invasion de l’Égypte par un roi puissant, que le prophète appelle Nabuchodonosor ; mais on a vu que Nabuchodonosor n’a jamais envahi l’Égypte. C’est Antiochus que le prophète a dans l’esprit ; et certains détails achèvent d’en faire la preuve. Il est dit (44-30) que l’envahisseur a fait prisonnier le roi Éphréé (l’Apriès des Grecs) et il n’y a rien de cela dans l’histoire ; mais Antiochus a réellement fait prisonnier le jeune Ptolémée Philométor. Il est dit aussi que la ville de ne est livrée à l’ennemi, — mais la vulgute, en cet endroit, traduit ce nom par celui d’Alexandrie, — et il en est de même dans Ézéchiel (30-14-16) et dans Nahum (3-8). Saint Jérôme dit, dans son commentaire sur Nahum, qu’il traduit ainsi d’après son maître d’hébreu, et il suppose qu’apparemment Alexandrie avait été bâtie sur les débris d’une ville de ne plus ancienne. Ne devons-nous pas plutôt croire que ce maître d’hébreu était l’héritier d’une tradition qui remontait à un temps où on savait que les livres prophétiques étaient en réalité postérieurs à Alexandre et à la fondation d’Alexandrie ?

J’ai déjà dit que je ne m’occuperais des prophéties sur Tyr qu’à l’article d’Ézéchiel.

La prophétie sur Édom (49-7) doit se rapporter, ainsi que celle d’Isaïe, à la conquête de l’Idumée par Hyrcan. Et quant à celle de