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de circumnavigation ; pour l’enseignement, transformation des mœurs scolaires, réduction des leçons publiques, institution de conférences intimes, création de Bourses d’enseignement supérieur, multiplication des enseignemens par la faculté donnée aux agrégés d’ouvrir des cours libres. De ce programme, il ne fut ébauché que quelques fragmens. Le ministre et ses collaborateurs, au premier rang desquels il faut placer M. du Mesnil, avaient la foi et la bonne volonté ; mais les crédits leur étaient parcimonieusement mesurés. A grand’peine avaient-ils obtenu les 300,000 francs de l’École des hautes études. Pour le reste, il eût fallu des millions. D’ailleurs, il faut le dire aussi, les facultés en général manquaient d’élan, et l’opinion publique restait indifférente.

Elle avait cependant reçu une assez vive secousse lorsque, derrière de violentes accusations de matérialisme et d’impiété contre les facultés, avait surgi tout à coup la revendication, depuis longtemps assoupie, de la liberté de l’enseignement supérieur. Pouvait-on vraiment ouvrir le champ, sans avoir auparavant mieux armé, pour la concurrence, les facultés de l’État ? Ce ne fut pas le sentiment de la commission chargée, en 1870, de préparer, sous la présidence de M. Guizot, un projet de loi sur la liberté de d’enseignement supérieur. À ce projet, elle joignit, comme corollaire ou comme préface, un programme de réformes dans les facultés de l’État, duquel tous les demandeurs et les autres, étaient tombés d’accord. En voici les principaux articles : « Que pour leur régime intérieur, spécialement pour la présentation aux chaires vacantes dans leur sein, pour l’emploi des agrégés, pour l’autorisation des cours qui pourront être donnés dans les locaux affectés à leur service, pour les diverses relations et les divers modes d’enseignement qui peuvent s’établir entre les professeurs et les élèves, les facultés instituées par l’État soient investies d’une large part d’autonomie et de liberté ; — qu’il soit pourvu, dans le budget de l’Etat, aux moyens personnels et matériels d’étude et de progrès dont le besoin se fait si vivement sentir dans l’enseignement supérieur, tels que l’augmentation du nombre des chaires et des professeurs titulaires ou agrégés, la formation et d’entretien des bibliothèques, des laboratoires et des divers instrumens de travail intellectuel ; — que dans quelques-unes des principales villes de l’État, et avec leur concours, il soit organisé un enseignement supérieur complet, c’est-à-dire réunissant toutes les facultés avec leurs dépendances nécessaires, de telle sorte que, sans détruire l’unité de la grande université nationale, ces établissemens deviennent, chacun pour leur compte, de puissans foyers d’études, de science et de progrès intellectuel. »

La guerre, qui vint ajourner ces réformes, en fit sentir bien plus