Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 100.djvu/951

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 août.

Cette fois la chose est faite, la session est dûment close. Un bel et bon décret de miséricorde, lu l’autre soir, entre neuf heures et minuit, au Luxembourg et au Palais-Bourbon, a rendu la liberté à des assemblées déjà à demi dispersées. Il fallait bien en finir, puisque l’heure était venue, puisque c’est la saison du repos, des voyages, des distractions, des vacances pour tout le monde, pour les législateurs comme pour les écoliers.

Entre les écoliers et les législateurs il y a seulement une différence. Les premiers s’en vont gaîment, comme une volée d’oiseaux. Après une année passée à l’étude, ils ont reçu l’autre jour, en pleine Sorbonne, leurs récompenses ; ils ont même pu, par surcroit, entendre des discours qui leur ont appris ou ont voulu leur apprendre ce que c’est que l’homme moderne, ce que sera le fils de l’avenir, le « jeune Français de demain, » façonné par des réformateurs improvisés. Ils n’ont peut-être pas toujours compris et n’ont aucun souci des expériences scolaires dont on leur parle. Ils sont partis sans remords et sans arrière-pensée, impatiens de vivre, de se retrouver dans leurs familles et de jouir de quelques semaines de liberté pour revenir bien tôt, plus frais et plus dispos, au travail. Ils sont la jeunesse vive et confiante qui n’a pas fait le mal et n’a pas connu les mécomptes. Les vacances parlementaires, — il faut l’avouer, — n’ont rien de cet aimable exode de la jeune population des écoles. Députés et sénateurs n’ont aucune raison de prendre leur congé si gaîment, de s’en aller contens de ce qu’ils ont fait, et leur départ ressemble à une délivrance pour le pays, qui les a vus à l’œuvre, aussi bien que pour eux-mêmes, qui finissaient par ne plus savoir où ils en étaient. Sûrement depuis six mois, ils ont vécu sans gloire, à peu près sans profit ; et, avant de disparaître pour trois mois, ils ont couronné leur session par un de ces débats où se révèlent la fatigue, les incohérences, les contradictions