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Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 101.djvu/875

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UNE INDUSTRIE PASTORALE.

l’emmenthal, qui atteint le poids de 140 kilogrammes et qui n’est qu’une variété de gruyère.

Dans un coin de la cuisine, la presse, qui joue un rôle important : on sait que la solidité des fromages suisses tient en partie à la pression énergique à laquelle ils sont soumis, pression qui les conserve pendant plusieurs années : 1 500 à 2 000 livres pour un fromage de 100 à 180 livres.

J’ai vu des presses de toute espèce, des systèmes déplorablement primitifs où la pression n’est nullement graduée : celle de mon chalet-modèle est la presse Laurioz qui se compose d’une table en chêne creusée d’une rigole pour l’écoulement du petit-lait : sur cette table, on place le fromage dans son moule et ses foncets, et une presse horizontale en fonte exerce sur le foncet supérieur la pression nécessaire au moyen de deux leviers fixés sur un arbre commun à la partie inférieure de la table ; l’un de ces leviers porte un bras gradué muni d’un poids curseur assez lourd ; la pression s’opère d’elle-même, croissant progressivement à mesure que le fromage comprimé devient plus dur, et le levier s’abaissant en même temps qu’il se débarrasse de son petit-lait.

La chambre à lait, située au nord et communiquant avec le vestibule, est le local où l’on entrepose le lait afin de conserver la traite du soir jusqu’au matin et de favoriser la montée de la crème. On y obtient la température modérée nécessaire au moyen d’une auge ou réfrigérant. Pour établir celui-ci, il faut avoir à sa disposition de l’eau courante ou de l’eau de puits qui circule dans des bassins où l’on dépose les vases à lait : ces bassins se construisent en ciment ou en bois recouvert de métal galvanisé ; ils doivent avoir 0m,60 de largeur et 0m,10 à 0m,13 de hauteur, sans compter les tringles du fond sur lesquelles on pose les rondes et qui ont 0m,04 d’épaisseur. Les rondots ou vases à lait sont en métal, très plats, et mesurent environ 24 litres. À Pontarlier, le fond de l’auge est garni d’un tube percé de petits trous par lesquels l’eau s’échappe et va frapper les rondots[1].

Près de la chambre à lait, la chambre à beurre, munie de tables, baratte, malaxeur, délaiteuse, moules à beurres, etc. L’expérience a prouvé l’utilité de fabriquer le beurre à la fruitière, la vente se faisant au profit de la société ou l’associé en disposant à son gré. Le cours du beurre dans nos villages ne dépasse guère la moyenne de 1 franc la livre ; or on atteint 1 fr. 40, 1 fr. 50 si l’opération est

  1. Dans les grandes laiteries françaises et étrangères, on met à profit les découvertes de M. Pasteur et on pasteurise le lait, en le chauffant d’abord jusqu’à 95 degrés environ, puis en le refroidissant rapidement jusqu’à quelques degrés seulement au-dessus de zéro : on le conserve ensuite à la température moyenne de 10 à 12°.