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apprécié l’heureuse et immense innovation sociale accomplie par le catholicisme quand il a organisé un système d’éducation populaire et surtout moral s’étendant à toutes les classes de la société… » — 7° La confession. Enfin un dernier point, et le plus délicat de tous, auquel Chateaubriand lui-même n’avait pas osé toucher, tant il craignait de blesser les préventions de son temps, c’est l’institution de la confession. Inutile de rappeler tout ce qui a été dit contre cette pratique ; rappelons seulement l’opinion d’Auguste Comte en faveur de « cette institution vraiment capitale, destinée à régulariser une importante fonction du pouvoir spirituel, car il est impossible que les directeurs réels de la jeunesse ne deviennent point, à un degré quelconque, les conseillers habituels de la vie active ; et d’autre part, sans un tel prolongement d’influence morale, l’efficacité sociale de leurs opérations ne serait pas suffisamment garantie… Les puissans effets moraux de cette belle institution pour purifier par l’âme et la rectifier par le repentir ont été si bien appréciés par les philosophes catholiques, que nous pouvons nous dispenser de toute explication. »

Tous les avantages précédens ne seraient rien s’ils n’avaient pour but et pour effet l’éducation morale du genre humain, et la propagation d’une doctrine meilleure que celle de l’antiquité. Pour le premier point, Auguste Comte attribue au catholicisme cette immense révolution d’avoir donné à la morale le pas sur la politique. « Il a créé des types moraux, auxquels on a eu le tort de reprocher l’exagération ; car c’est le propre de l’idéal d’être au-dessus de la réalité. » Il fait encore honneur au christianisme d’avoir fait de la morale individuelle la base de la morale. L’individu, dans l’antiquité, n’était qu’un citoyen ; dans le christianisme, il a aspiré à la perfection en tant qu’homme. Auguste Comte n’hésite pas à faire l’éloge d’une vertu essentiellement chrétienne, et que les philosophes et les sages mondains ont toujours tenue plus ou moins en suspicion, comme entachée d’hypocrisie : c’est l’humilité. Un autre service rendu également par la morale chrétienne, et que Comte relève avec pleine justice, c’est la proscription du suicide. Les pythagoriciens et Platon avaient devancé cette doctrine ; mais les épicuriens et les stoïciens avaient effacé les traces de cette protestation. C’est encore l’honneur du christianisme d’avoir amélioré et perfectionné la vie domestique et de l’avoir mise au-dessus de la vie publique. Il a relevé la condition de la femme, et a fondé le mariage sur le principe de la fixité. Auguste Comte se prononce à cette occasion avec une rare énergie contre la thèse du divorce. « Ici vainement, dit-il, argue-t-on de quelques dangers exceptionnels et secondaires pour déprécier aujourd’hui cette indispensable fixité