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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 mars.

Que faut-il donc croire, que peut-on attendre de ce temps où nous vivons ? Il est certain que tout s’agite, que tout est confondu et que, dans la plupart des pays, on ne sait pas où l’on va.

La vie des peuples contemporains est réellement un étrange assemblage de questions enchevêtrées, de contradictions et d’incohérences. Questions sociales, questions religieuses, questions économiques, questions de gouvernement intérieur, questions de défense nationale, questions d’alliances et de diplomatie, tout se mêle, tout se tient ; tout semble aussi se résoudre dans une sorte de crise permanente, commune aux plus grandes nations de l’Europe. Que la France, entre toutes, ait sa part d’épreuves et d’embarras dans ce vaste mouvement, c’est trop réel, puisque les partis qui la gouvernent le veulent ainsi. Le fait est qu’il y a des difficultés pour tout le monde, qu’il y a partout, en Allemagne comme en Autriche, en Angleterre comme en Italie, les mêmes problèmes, — des agitations sociales, des scissions intestines, des crises de pouvoir, des malaises économiques, qu’il y a surtout dans la plupart des pays, un intérêt commun, ces affaires du travail que l’empereur Guillaume, par une fantaisie souveraine, vient de déférer à une sorte de congrès de l’Europe. C’est un fait universel ! Et à y regarder de près, si on le voulait, ce serait encore la France qui se trouverait la nation la mieux défendue contre les grands troubles, avec ses ressources, avec son état social libéralement réformé depuis longtemps, avec le bon sens naturel de son peuple. Le malheur ou le désavantage de la France, c’est de rester livrée à des partis qui, au lieu de lui donner ce qu’elle demande, l’ordre financier, la paix morale, une protection équitable, ne sont occupés que de leurs petits intérêts. Le mauvais sort de notre pays est d’être retenu dans une situation où il ne peut réussir à voir devant