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figures ; mais quel entrain dans toute la scène, soit au centre, où se précipite, arrivant de face, un quadrige de chevaux blancs, soit sur la droite, où roulent pêle-mêle dans la poussière, barrant la route à un autre char emporté, l’attelage et le cocher d’un char tombé qui vole en éclats ! Qu’un jeune artiste, tel que M. Checa, joigne, par l’étude, à son tempérament, l’expérience matérielle et technique, vous verrez comme il dispersera, toute la languissante école des brouillardistes, des embrumés et des figés !

L’antiquité, profane ou sacrée, n’inspire pas, en général, à nos peintres, des compositions si hardies. Leur imagination est pauvre ; c’est par le petit côté, anecdotique et familier, qu’ils aperçoivent les temps héroïques, la mythologie, la Bible, l’Evangile, l’histoire. Ils y déploient souvent de l’ingéniosité, quelquefois des intentions poétiques, plus rarement des qualités de peintres qui assurent à cette ingéniosité et à ces intentions de la portée et de la durée. Au fond, c’est toujours le métier qui manque. Tous n’ont pas reçu cette bonne éducation de l’œil et de la main qui permet à M. Vollon fils de donner tant de saveur à une simple pochade ; Don Quichotte, lisant ses livres de chevalerie. Voilà vraiment de la peinture, spirituelle, vive, enjouée, sans prétention comme sans fadeur ! C’est à quoi il s’en faudrait tenir en des sujets si minces ! Les Sept Troubadours, en robes rouges, que M. Jean-Paul Laurens nous montre, assis sous les arbres verts, discutant les statuts des jeux floraux devaient être traités avec plus de gravité ; ils portent bien sur leurs visages et dans leurs allures cet air extraordinaire de vraisemblance historique que l’artiste studieux sait imprimer à presque tous ses personnages ; La scène est amusante, bien éclairée, bien peinte. On remarque encore dans le genre historique, pour la netteté ferme de l’exécution, la Procession de pènitens en Espagne, par M. Melida ; pour l’esprit de la mise en scène, la Nouvelle arrivée au harem de Thèbes sous la XVIIIe dynastie, et le Combat de cailles, par M. Rochegrosse. La composition de M. Scherrer, Duval d’Épréménil, se rapproche plus, par le faire, comme par les dimensions, de la vraie peinture d’histoire. Le plus fin de tous ces évocateurs du passé est M. François Flameng. Sans être un élève direct de M. Meissonier, M. Flameng lui emprunte toutes ses méthodes ; c’est à ce goût persistant pour l’exactitude qu’il doit les progrès de son talent. En concentrant dans de petits cadres son intelligence de l’arrangement pittoresque, son aisance à s’incarner dans le passé, sa bonne humeur, son esprit d’observation, toutes qualités bien nationales, le jeune décorateur de la Sorbonne les fait mieux valoir, avec plus de grâce à la fois et plus de force. Sa Halte d’infanterie de ligne, en 1789, dans une clairière