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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 104.djvu/375

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pour donner à l’homme le respect absolu et fanatique de la vérité.

Les mathématiques, l’algèbre et l’analyse infinitésimale principalement suscitent encore à un haut degré la conception des signes et des symboles, instrumens nécessaires qui augmentent la puissance et la portée de l’esprit humain, en résumant sous une forme condensée et en quelque sorte mécanique tout un ensemble de relations : ces auxiliaires sont surtout précieux en mathématiques, parce qu’ils y sont adéquats à leurs définitions; caractère qu’ils ne possèdent pas au même degré dans les sciences physiques et naturelles. Quoi qu’il en soit, il y a là tout un ensemble de facultés qui ne sauraient être pleinement mises en jeu que par l’enseignement des mathématiques : elles le seraient encore davantage, si cet enseignement était dirigé de façon à laisser libre jeu au travail personnel de l’élève, au lieu de le forcer à entrer dans les cadres minutieux et tracés à l’avance d’un système de concours obligatoires.

Les mathématiques sont l’instrument indispensable de toute recherche physique. Mais les sciences physiques reposent principalement sur d’autres méthodes, dont la discipline concourt d’une façon propre à l’éducation de l’enfant et développe en lui des facultés nouvelles et non moins essentielles, aussi bien au point de vue intellectuel qu’au point de vue moral.

Je veux parler des facultés d’observation et d’expérimentation. En effet, elles ont pour objet la connaissance de la nature, et celle-ci, contrairement à celle de la géométrie, ne s’acquiert point par le raisonnement. Nous sommes les esclaves d’une vérité qui nous est extérieure et que nous ne pouvons connaître qu’en l’observant. C’est d’abord un enseignement de choses qui prévaut ici ; il peut et doit être donné dès la plus tendre enfance. Par ce côté l’éducation scientifique et surtout les leçons de l’histoire naturelle sont nécessaires dès les premières années de l’enseignement secondaire ; et c’est une grande faute, à mon avis, que de prétendre, comme on l’a fait quelquefois, les rejeter dans les dernières années d’études. C’est, au contraire, par là qu’il faudrait débuter. Rien n’est plus suggestif, plus propre à développer le goût de la connaissance des choses et le sentiment de leur comparaison que l’étude de la zoologie et de la botanique. Les enfans ont de bonne heure la fantaisie des collections, et les notions morphologiques, si utiles pour le développement des arts ainsi que des sciences, pénètrent ainsi d’une manière pour ainsi dire insensible et sans effort dans ces jeunes esprits. Ils acquièrent en même temps la notion générale de la classification, qui joue un grand rôle dans toutes les connaissances humaines, ainsi que la notion plus générale