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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 104.djvu/425

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secours additionnel de six millions de livres pour les États-Unis[1].

Le plan de campagne consistait d’abord à aller à la Jamaïque, à l’attaquer avec soixante vaisseaux de ligne et des forces de terre considérables. La Fayette obtint du ministère français l’engagement qu’après la prise de la Jamaïque, le comte d’Estaing se porterait devant New-York et qu’il détacherait de sa flotte un convoi de six mille Français pour tenter une révolution dans le Canada, expédition que le marquis n’avait jamais perdue de vue.

Un incident nous est révélé par ses Mémoires. Lorsque, dans les arrangemens du plan de campagne, d’Estaing proposa au roi d’Espagne, Charles III, de nommer La Fayette commandant provisoire à la Jamaïque : u Non ! non ! répondit avec vivacité le vieux monarque, je ne veux pas cela : il y ferait une république ! » Mais il consentit à la partie du plan qui portait une armée navale à New-York et un corps de troupes au Canada. Cette puissante expédition aurait réuni aux îles soixante-six vaisseaux et vingt-quatre mille hommes. Le corps de Rochambeau était déjà arrivé dans un port de l’Amérique espagnole pour s’y joindre.

Tout annonçait le succès de la plus forte armée de terre et de mer qui eût paru dans les colonies. L’appréhension de la lutte mit fin aux tergiversations du gouvernement anglais, et, au moment de prendre le large, on apprit que la paix était faite. Les préliminaires entre la France et l’Angleterre avaient été signés à Versailles, le 20 janvier 1783, par M. de Vergennes et M. Fitz-Herbert, plénipotentiaire de Sa Majesté britannique. Ces préliminaires furent convertis en un traité de paix définitif le 3 septembre 1783. Il fut signé, pour l’Espagne, par le comte d’Aranda ; pour l’Angleterre, par le duc de Manchester, et pour la France, par M. de Vergennes. Le traité définitif entre la Grande-Bretagne et les États-Unis fut signé le même jour, à Paris, par David Hartley, d’une part, et par John Adams, Benjamin Franklin et John Jay de l’autre. La veille, avaient été conclues, également à Paris, les conventions particulières entre l’Angleterre et les États-Généraux de Hollande.


IV.

Lorsqu’un courrier eut fait connaître ces nouvelles à Cadix[2], La Fayette eût voulu les porter lui-même, à son tour, aux États-Unis ; mais Carmichaël, leur chargé d’affaires, lui écrivit que sa présence et son influence étaient nécessaires au succès des négociations avec

  1. Voir lettre du 22 novembre 1782, t. II.
  2. Voir lettres des 20 janvier, 5 février 1783. (Correspondance, t. II.)