d’elle que l’architecte doit s’inspirer pour les employer judicieusement et en tirer le plus heureux parti. L’étude approfondie des rapports secrets qu’elle a établis entre nos sentimens et certaines formes est l’une des plus importantes auxquelles il puisse se livrer pour obtenir les effets qu’il cherche, pour agir comme il l’entend sur nos yeux et sur notre esprit. Dans une œuvre d’architecture comme dans toute œuvre d’art, la qualité suprême est le divin naturel.
La musique, elle aussi, est un art qui a pour premier principe des analogies naturelles, et plus elle les observe et les reproduit avec fidélité, plus elle a d’action sur nous. Il y a une conformité, une correspondance mystérieuse entre les vibrations des corps et de l’air et celles de nos nerfs et de notre cœur. Le bourdonnement d’un insecte, le pétillement d’une flamme, le cri même d’un essieu, tous les bruits nous semblent exprimer les mouvemens d’une âme analogue à la nôtre et nous affectent comme un langage, et d’autre part, nous ne pouvons ressentir une émotion sans que le son de notre voix, l’accent de notre parole, en soient sensiblement modifiés. Darwin inclinait à croire qu’avant de parler, l’homme a chanté comme un. oiseau. Ce qui est certain, c’est qu’il a chanté de bonne heure, car si l’entendement parle, a-t-on dit, la passion chante. Qu’elle nous trouble ou nous exalte, les diverses inflexions de notre voix, le ton qui s’élève ou qui s’abaisse, des sons coulés, détachés ou martelés, la mesure qui s’accentue, des temps et des intervalles de notes plus marqués, de brusques passages de l’aigu au grave ou du grave à l’aigu, les inégalités d’un rythme tour à tour plus vif ou plus lent, révèlent les sentimens qui nous agitent ou nous dépriment et les communiquent à ceux qui nous écoutent. « Quel est le modèle du musicien quand il fait un chant ? disait Diderot dans son Neveu de Rameau. C’est la déclamation. Il faut la considérer comme une ligne, et le chant comme une autre ligne qui serpenterait sur la première. Plus cette déclamation, type du chant, sera forte et vraie, plus le chant qui s’y conforme la coupera en un plus grand nombre de points. » Comme Diderot, Herbert Spencer retrouve dans le chant tous les caractères du langage de la passion, mais exagérés et réduits en système. Bien des siècles avant eux, un auteur grec avait dit « que l’accent pathétique et oratoire doit être regardé comme la semence de toute musique. »
C’est en imitant le langage naturel du cœur humain que la musique traduit en images sensibles tous les mystères de notre âme, tout ce qui se passe au plus profond de nous-mêmes, nos troubles et nos apaisemens, nos joies et nos tristesses, nos colères et nos