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dispositions du présent acte. Toutes les puissances signataires auront la faculté d’être représentées dans ces tribunaux mixtes, » La Grande-Bretagne avait fait prévaloir plus ou moins complètement ce système dans un grand nombre de conventions, et particulièrement dans le traité d’avril 1862, par lequel les États-Unis lui concédaient, en même temps que le droit réciproque de visite, l’établissement de tribunaux mixtes pour statuer sur les prises et les ventes de navires. Nos plénipotentiaires eux-mêmes furent peut-être un moment trop enclins à laisser s’opérer, pour faciliter l’entente, la substitution d’une juridiction internationale aux juridictions nationales : substitution d’ailleurs difficilement conciliable avec la diversité des régimes auxquels allaient être soumises les hautes parties contractantes, selon le genre de contrôle que devaient leur imposer des lois conventionnelles distinctes. Au demeurant, la conférence adopte le système que la France avait fait prévaloir dans les conventions anglo-françaises de 1831 et de 1833. Les navires capturés et leurs équipages durent être conduits dans le port de la zone le plus rapproché où se trouverait une autorité compétente de la puissance dont le pavillon aurait été arboré; les tribunaux compétens furent ceux de la nation dont les couleurs auraient été arborées par le bâtiment capturé. M. Charmes, rapporteur, et M. Ribot, ministre des affaires étrangères, ont bien fait d’insister sur cette attribution de compétence exclusive à la juridiction française ; elle offre une garantie très sérieuse à tous les bâtimens qui portent le pavillon français.

L’article 21 de l’Acte général trace soigneusement les limites de la zone maritime où s’exercera la surveillance des puissances signataires. La conférence a restreint le champ immense dans lequel on avait pratiqué jusqu’ici[1] soit le droit de visite proprement dit, soit les enquêtes de pavillon[2]. Pour mesurer tout le terrain que le droit de visite a perdu dans l’espace, il faut relire attentivement le traité de 1831. À cette époque, la France admettait ou subissait le droit de visite, non-seulement tout le long de la côte occidentale d’Afrique depuis le Cap-Vert jusqu’à la distance de dix degrés au sud de l’équateur, mais tout autour de l’île de Madagascar

  1. Voir la convention anglo-française du 29 mai 1845, art. Ier.
  2. Cette zone nouvelle « s’étend entre, d’une part, les côtes de l’Océan-Indien (y compris celles du Golfe-Persique et de la Mer-Rouge) depuis le Béloutchistan jusqu’à la pointe de Tangalane (Quilinsane) et, d’autre part, une ligne conventionnelle qui suit d’abord le méridien de Tangalane jusqu’au point de rencontre avec le 26e degré de latitude sud, se confond ensuite avec ce parallèle, puis contourne l’île de Madagascar par l’est en se tenant à 20 milles de la côte orientale et septentrionale, jusqu’à son intersection avec le méridien du cap d’Ambre. De ce point, la limite de la zone est déterminée par une ligne oblique qui va rejoindre la côte du Béloutchistan, en passant à 20 milles au large du cap Raz-el-Had » (art. 21).